Dans la forêt polonaise enneigée, une « pauvre bûcheronne » recueille un nourrisson jeté d’un train par son père. Entassé avec des dizaines de familles juives dans un wagon bondé, l’homme, par son geste désespéré, pense donner une chance de survie, aussi infime soit-elle, à sa fille.
Cinéaste éclectique de comédies et de drames, Michel Hazanavicius s’empare du court texte (éditions du Seuil, La Librairie du XXIᵉ siècle, 2019) de Jean-Claude Grumberg, dramaturge et écrivain marqué par les tragédies de la Shoah. En choisissant l’animation, le réalisateur, qui dévoile ici ses talents de dessinateur, offre une nouvelle dimension à La Plus précieuse des marchandises, conte poignant et humaniste.
Respectant la force poétique et dramatique du récit de Jean-Claude Grumberg, La Plus précieuse des marchandises ouvre une réflexion nouvelle sur la Shoah où, malgré l’horreur, l’espoir d’une Humanité meilleure s’envisage. Bête hurlante à travers la neige, le train de la mort laisse tomber une « marchandise » – ainsi nommait-on les Juifs emmenés dans les camps d’extermination. Et le « pauvre bûcheron » de s’interroger: « les sans-cœurs ont-ils un cœur? »
Dessins simples, traits rudes et décors magnifiques, la force de La Plus précieuse des marchandises repose également sur les voix. Le narrateur d’abord, Jean-Louis Trintignant comme sorti d’outre-tombe dans son dernier rôle enregistré avant sa mort. Dominique Blanc ensuite, dans la voix de la touchante « pauvre bûcheronne ». Puis Grégory Gadebois dans celle du « pauvre bûcheron » tiraillé entre son humanité et la peur du rejet et enfin Denis Podalydès qui habite un étonnant personnage brisé par la guerre.
Un chef d’œuvre. Une nouvelle pierre à l’édifice pour crier les actes antisémites.
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