Au début des années 1950, Jacqueline Audry sort sur les écrans un film courageux et passionnant: « Olivia ». Seule femme cinéaste française des années 1940-1950 – et ce avant même les débuts d’Agnès Varda – la cinéaste adapte en 1951 le roman autobiographique paru deux ans plus tôt d’une auteure anglaise, Dorothy Bussy.

Olivia est la nouvelle élève d’un pensionnat de jeunes filles situé à Fontainebleau. D’origine anglaise, elle intègre cette respectable institution bourgoise dirigée par deux femmes: la charismatique mademoiselle Julie (Edwige Feuillère) et son « amie » mademoiselle Cara (Simone Simon). Les élèves sont fascinées et séduites par l’autorité et la grâce de mademoiselle Julie qui règne en maîtresse des lieux. L’ingénue Olivia tombe amoureuse de sa directrice, révélant à la femme mûre des sentiments similaires.

Porté par un casting exclusivement composé d’interprètes féminines, « Olivia » est un huis-clos évoluant entre les salles de cours, le réfectoire, le parc et, à la nuit tombée, les chambres. Le film n’est pas tant une histoire d’amour au féminin, c’est le récit de l’apprentissage de l’amour et la révélation, chez les différentes protagonistes, de sentiments contrariés. A cet effet, le personnage de mademoiselle Julie, femme d’autorité et de savoir, est le plus abouti: elle provoque l’émoi des jeunes filles, joue de son emprise auprès de celles-ci et rend malade de jalousie mademoiselle Cara, qui fut, on le devine, sa compagne.

Une mise en scène classique mais envoûtante comme un conte de fée – le jeu des miroirs, l’étonnante scène du bal de Noël, l’escalier ovoïdal de la demeure – ainsi que son sujet brûlant, encore aujourd’hui, font de cette oeuvre un film à redécouvrir de toute urgence.

Edwige Feuillère, son port altier, sa grâce et sa voix mêlée d’autorité et de douceur, est une mademoiselle Julie inoubliable, une sorte d’alter ego de Maria Casarès dans « Les Dames du bois de Boulogne« .