Il s’appelle Bertrand. Cet enfant né à Lyon en 1941 et dont le père poète et philosophe, René Tavernier fut un résistant notoire, découvre lors d’un séjour au sanatorium pour soigner sa tuberculose la passion du cinéma. C’est à Saint-Gervais en Haute-Savoie qu’il garde le souvenir impérissable d’un film dans lequel une scène de course-poursuite à moto le fascine. Il retrouve vingt-cinq ans après le titre du film qui lui a donné le goût du cinéma: « Dernier Atout » (1942) le premier long-métrage de Jacques Becker.
A Paris, le jeune homme fréquente assidûment les salles obscures et, en cette année 1961, fonde avec ses amis Yves Martin et Bernard Martinand le ciné-club Nickel-Odéon au sein de la Cinémathèque, alors hébergée à Chaillot. Bertrand Tavernier défend déjà le cinéma de genre, les films trop vite oubliés malgré les talents d’inventivité et de création. Le chemin de l’apprenti attaché de presse puis scénariste va passer par celui de la critique de films aux Cahiers du cinéma, à Positif et à Présence du cinéma.
Ses premières collaboration sur les plateaux de cinéma seront effectuées pour l’étrange Jean-Pierre Melville dont il est l’assistant avec son ami d’enfance Volker Schlondorff sur le film « Léon Morin, prêtre ». En 1974, il se lance dans la réalisation de son premier long-métrage: l’adaptation d’un « roman dur » de Georges Simenon: « L’Horloger de Saint-Paul ».
Pour son nouveau film depuis « Quai d’Orsay« , Tavernier a choisi de nous faire voyager dans un long-métrage documentaire qui retrace les films et les auteurs français qui ont marqué l’homme et le cinéaste. Cela commence avec Jean Vigo, le cinéaste prématurément disparu de « L’Atalante » et finit avec son ami Claude Sautet. Entre temps, « Voyage à travers le cinéma français » nous aura emmené dans le monde de Jacques Becker, de Marcel Carné, de Jean Renoir bien sûr et dans l’univers musical de Maurice Jaubert, un compositeur de musiques de films dont Truffaut a utilisé les bandes dans « L’Histoire d’Adèle H. » et « La Chambre verte ».
Bertrand Tavernier aime aussi les cinéastes plus marginaux comme Jean Sacha et ne tarit pas d’éloge pour Jean Gabin, un acteur qui n’avait pas oublié son milieu prolétaire, pour Louis Jouvet, Arletty ou le grand Jules Berry.
A travers de nombreuses scènes de films et d’interviews d’hommes de cinéma, Bertrand Tavernier livre les souvenirs et anecdotes de ses rencontres. Durant trois heures, qu’on ne voit pas passer, « Voyage à travers le cinéma français » nous fait revivre nos émotions de cinéphiles.
Bertrand Tavernier, cinéaste, est aussi un grand passeur, à l’origine de la cinéphilie de nombre de spectateurs.
[…] Bertrand Tavernier et son « Voyage à travers le cinéma français » on ne peut que s’émouvoir devant le travail remarquable de cet autre lyonnais […]