« Les Éternels – Ash is purest white » est le nouveau film réalisé par Jia Zhang-ke, la coqueluche des critiques de cinéma occidentaux. Ce film-fleuve narre dix-huit ans de vie d’un couple d’amants, Qiao et Bin, qui, au début des années 2000, est à la tête d’un clan mafieux de Datong, une ville de la province du Shanxi. Mais l’ultra-capitalisme galopant d’une Chine en pleine mutation remet en cause le clan de « Frère Bin » : son autorité menacée et un long séjour en prison entachent la petite entreprise. Quant à la passion des amants, les années d’enfermement l’ont asséchée.

Après l’impressionnant « A Touch of sin » (2013), Jia Zhang-ke explore de nouveau son pays, dont les hommes et la nature subissent une politique dictée par un capitalisme violent et inhumain. Ici, on délocalise une usine et ses ouvriers d’une province à une autre. Là, on inonde des plaines et des villages pour construire de gigantesques barrages. Au milieu de ces radicales transformations, même Qiao, sorte de parrain local, voit son autorité remise en question par de nouvelles bandes rivales dépourvues de l’ancestral sens de l’honneur. Dans ce chaos, seul l’amour des amants donne un peu d’espoir.

Jia Zhang-ke possède indéniablement une parfaite maîtrise de la mise en scène: ses plans magnifiques sur les paysages grandioses des contrées et des villes écrasent ses deux protagonistes, mis sur le bas côté de la grande marche en avant que le pays entame depuis des années. Ses acteurs impressionnent de désespoir et de violence contenue. Mais, à l’instar de ses protagonistes, le spectateur peut également se sentir laissé de côté dans ce film à la fois noir et mélodramatique. En cause, une extrême lenteur de la narration et une absence d’émotion dans la passion triste des amants.