Il est un pays de montagnes où les femmes n’ont pas le droit de vivre leur vie comme elles l’entendent, ne peuvent envisager un désir d’indépendance, voire une vie de célibat. Pire, au yeux des mâles dominants, elles ne peuvent porter le fusil, cette arme au symbole si phallique. Ce pays, l’Albanie, est en Europe. Il pourrait d’ailleurs se situer dans n’importe quelle contrée de notre monde.

Porté par l’extraordinaire Alice Rohrwacher, « Vierge sous serment » est le premier film de Laura Bispuri. Il met en scène une jeune orpheline, Hanna, qui préfère la chasse à la poupée. Ce type de femme est mal vue dans ce pays où le climat est aussi rude que les mentalités. Hanna adulte est mise aux bans du village: elle devra vivre seule, comme un homme. Pire, elle devra jurer de renoncer à sa féminité, à la maternité et au plaisir. Hanna, devenu Mark, décide de chercher en Italie la femme qu’elle fût.

Ce sujet étrange et néanmoins réel, inspiré d’un roman de Elvira Dones, pose une nouvelle fois la question féministe dont le constat est toujours aussi alarmant: être une femme libre n’est jamais acquis, cela nécessite une construction permanente. Lorsque ce ne sont pas les religions, ce sont les coutumes ancestrales qui déconsidèrent et sous estiment les femmes.

Laura Bispuri aborde finement son sujet dans une mise en scène âpre et des décors aussi majestueux (les montagnes albanaises) qu’étouffants (les grands ensembles des banlieues). Après « Amore » , « La Belle endormie » ou « Hungry hearts » , Alba Rorhwacher confirme son immense talent.