Les bandes-dessinées ont décidément le vent en poupe au cinéma. Après « La Vie d’Adèle » adaptée d’une bande-dessinée de Julie Maroh, le coréen Bong Joon Ho adapte « Le Transperceneige », un récit d’anticipation de Jean-Marc Rochette et Jacques Lob paru en 1982. Cette oeuvre délirante explore un groupe d’humains, survivants de la glaciation de la Terre, contraints de vivre ensemble à bord d’un train qui ne cesse de rouler autour du globe terrestre, n’offrant comme unique vue à ses passagers des montagnes et des champs de ruines enneigés. Les classes dominantes vivent dans les luxueux wagons aménagés à l’avant du convoi tandis que les dominés survivent dans un univers concentrationnaire en queue de train. Seule une révolution contre cette barbarie nazie, menée par un groupe de rebelles avec à sa tête Curtis (Chris Evans), pourrait renverser l’ordre des choses élaboré par le sauveur (et dictateur) de ces derniers humains: Wilford (Ed Harris).
Sur le papier, « Le Transperceneige » rappelle le meilleur de la littérature d’anticipation: on pense ainsi à « Malevil » et à « L’Île » de Robert Merle où une poignée de groupes d’humains doit reconstruire une société après un cataclysme écologique ou un naufrage. La survie passe immanquablement par la lutte pour accéder au pouvoir et par le maintien d’un équilibre fragile. Au cinéma, « Snowpiercer » aurait pu devenir, au pire un vulgaire blockbuster, au mieux une curieuse Série B.
C’est heureusement le coréen Bong Joon Ho, dans un coproduction américano-sud-coréenne-française, qui s’est attelé à la réalisation de ce récit de science-fiction. On doit à ce génial cinéaste les terrifiants « Memories of Murder » et « The Host ». Bong Joon Ho a recréé le récit de Jean-Marc Rochette et Jacques Lob dans un univers visuel bluffant. De magistrales et sanglantes scènes de combats, rythmées par la musique de Marco Beltrami, ponctuent l’avancée de cette Arche de Noé vers la révolte contre « La Machine », la tête pensante mécanique à qui on doit à la fois la survie de l’humanité mais aussi son ignoble cruauté.
Alors que les passagers de la tête du convoi se comportent comme de véritables bataillons nazies prêts à tout pour conserver leurs prés carrés, les damnés des derniers wagons ne sont pas tout à fait les saints hommes qu’on pourrait croire: c’est là toute la finesse du récit des auteurs du « Transperceneige » qui, sur grand écran, est devenu un très original film d’anticipation, doté de cruauté, d’humour noir et d’une vision désespérée de l’Homme.
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. Dans le magazine Première d’ octobre 2013 , Thomas Agnelli souligne que le film « devrait marquer l’histoire du cinéma de science-fiction. À dire vrai, le film ne ressemble à rien de connu ».