Première Guerre mondiale. Jeune poète britannique, Siegfried Sassoon (Jack Lowden) revient traumatisé des horreurs du champ de bataille. Objecteur de conscience, il adresse une lettre à ses supérieurs. Envoyé à l’hôpital psychiatrique militaire plutôt, échappant ainsi à la cour martiale, le jeune homme y fait la rencontre du conciliant Docteur Rivers (Ben Daniels) ainsi que d’un autre pensionnaire, le poète Wilfred Owen (Matthew Tennyson).
Œuvre posthume de Terence Davies (1945-2023), l’auteur de A quiet passion (2017) explore les traumas imprescriptibles de Sassoon, interprété par deux comédiens: Jack Lowden, parfait en jeune homme romantique, et Peter Capaldi en Sassoon plus âgé. Le jeune homosexuel issu de la bourgeoisie poursuit tant bien que mal son chemin sinueux dans les années d’après-guerre. Les passions amoureuses pour le mondain Stephen Tennant (Calam Lynch) ou le comédien Ivor Novello (Jeremy Irvine) ne le détourneront cependant pas des conventions maritales avec Hester (Kate Phillips).
Mis en scène avec une précision chirurgicale, d’une sobriété élégante tout en insérant des images d’archives de guerre et des morphing pour passer d’un âge de la vie à un autre, Les Carnets de Siegfried propose le récit d’un jeune homme moderne et trop lucide, étouffant dans son époque et dénonçant les décisions funestes des dirigeants britanniques.
Sans tomber dans le biopic académique, Terence Davies redonne vie à la jeunesse mondaine et décadente de l’entre-deux guerre, traumatisée par les millions de morts. Entre deux dialogues superbement écrits et souvent féroces, Terence Davies y insert quelques écrits poétiques de Sassoon, tel When I’m Among a Blaze of Light (Je rêve d’une pièce que seul le feu éclaire).
La belle troupe de comédiens au jeu théâtralisé et l’atmosphère pesante et crépusculaire du récit font de ces Carnets de Siegfried une grande œuvre de cinéma, forte et sombre.
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