Un homme marche seul le long des quais brumeux de Rimini, station balnéaire sur la côte adriatique. Professeur de lettres presque quadragénaire, Daniele Dominici (Alain Delon) vient tout juste d’arriver dans la cité italienne pour effectuer durant quelques mois d’hiver un remplacement au lycée local. Enseignant iconoclaste et vêtu d’un éternel manteau beige, Daniele est subjugué par la beauté triste d’une de ses élèves au doux prénom d’une héroïne de Stendhal, Vanina (Sonia Petrova). Éperdument amoureux, le professeur s’enfonce bientôt dans la nuit brumeuse et morbide de la passion désespérée.
Une des plus grandes œuvres de la filmographie d’Alain Delon, « Le Professeur » est un film pourtant assez confidentiel, marqué par la noirceur de ses personnages. Les Films du Camélia et Pathé ressortent en salles la copie restaurée et inédite en version intégrale de ce chef d’oeuvre écrit et réalisé par Valerio Zurlini. Lorsqu’il sort sur les écrans français en 1972, le film au doux titre « La prima notte di quiete » (la première nuit de quiétude) est affublé du titre banal « Le Professeur » et, surtout, amputé d’une quinzaine de minutes.
Les cinéphiles découvrent aujourd’hui un film d’une rare beauté et d’une noirceur absolue. Daniele n’est – on le découvrira à la fin du film – pas forcément le « pouilleux » dont l’affublent ses camarades de jeux mais un aristocrate désargenté, malheureux, désillusionné, en errance dans la triste Rimini hivernale. Seules la littérature et les fresques de Piero della Francesca lui donnent la raison de vivre et d’enseigner. Même sa femme Monica (Léa Massari), elle aussi dépressive, ne peut le retenir plus longtemps vers le chemin du désespoir. Pourtant, une lueur de vie, âgée de 18 ans, pointe dans sa vie: Vanina.
Portés par la superbe musique de Mario Nascimbene, les plans sombres et glauques de Valerio Zurlini ainsi que la beauté des amants, « Le Professeur » est magnifique de nostalgie et de désespoir. A la question « pourquoi la mort est-elle la première nuit de quiétude? », Daniele répond « parce qu’on dort enfin ans rêver. »
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