Michel Bouquet incarnant le peintre Renoir? L’idée est forcément alléchante de voir l’immense acteur jouant un Renoir âgé, maugréant et souffrant comme une bête. Seule la peinture et une jeune et pétillante modèle, Andrée (Christa Théret), donneront à cet homme fatigué un dernier souffle de vie dans le cadre idyllique de la Côte d’Azur.

Dans le film de Gilles Bourdos, il y a en fait deux Renoir: le père au crépuscule de sa vie et l’un de ses fils, Jean (Vincent Rottiers) cherchant sa vocation artistique. Le film rappelle d’ailleurs à ceux qui l’ignoraient (sic) que Jean Renoir est devenu un des plus grands réalisateurs de cinéma… C’est un peu ça le problème avec le film de Gille Bourdos: c’est qu’il s’emmêle parfois les pinceaux (c’est la cas de le dire) en cherchant quel Renoir il va conter. Des deux Renoir, celui de Jean est complétement mis de côté au profit de Pierre-Auguste le patriarche. On aurait voulu plus de profondeur dans cette relation filiale exceptionnelle.

En plus, le film a la fâcheuse tendance à vouloir trop montrer, tout expliquer. Si vous ajoutez la bande-son omniprésente, pourtant joliment composée par l’inévitable Alexandre Desplat, le film est ainsi plombé par ses lourdeurs et ses maladresses.

Cependant le cinéaste parvient à transmettre une fraicheur et une grâce dans ce cadre de verdure, dans cette formidable maison (tourné au domaine du Rayol à Canadel-sur-Mer), loin des horreurs de la guerre (nous sommes en 1915). La photographie de Mark Ping Bing Lee, qui collabore aux côtés de Wong Kar-wai est éblouissante.

En père écrasant et écrasé par la souffrance, Michel Bouquet est excellent. En parfait « scrogneugneu », comme lui fait remarquer Andrée, il sait également du fond de ses orbites incarner la douleur d’un vieillard. C’est poignant. Christa Therét convainc, et la tâche était rude d’exister face à Michel Bouquet, même si elle a tendance à surjouer un peu. Les domestiques en font par contre des tonnes… Il faut aussi signaler la main de Renoir: c’est un ancien faussaire sorti de prison, Guy Ribes, qui exécute à la perfection les toiles du film…

Resteront les images de ce « Renoir », la beauté de la chair des femmes, plus que son scénario qui manque de consistance.