Pour son 44ème film et après quelques errements dont la trilogie inachevée « Le Genre humain », Claude Lelouch revient en force avec un casting chorale et insolite comme il les affectionne tant. Dans « Salaud, on t’aime » , son nouvel opus lancé par une campagne de communication efficace avec une affiche joviale inondant les murs, on retrouve – avec bonheur il faut le dire tant le duo fonctionne bien – deux figures mythiques de la chanson française: Johnny Hallyday et Eddy Mitchell. Et une pléiade d’acteurs – d’actrices plutôt – certaines sur le retour, d’autres nouvelles-venues dans « la grande famille lelouchienne ».

Tous les ingrédients (ou tics c’est selon) du cinéaste sont réunis dans « Salaud, on t’aime » : évidemment, on s’aime. Evidemment, on pleure. Evidemment, les femmes sont jolies, minces et amoureuses. Evidemment, le hasard s’en mêle. Evidemment, le tour de France passe proche de la « ferme » alpine (plutôt un chalet de luxe où quelques moutons et un Rufus sous-exploité font figure de décor alpestre) du héros vieillissant (Johnny Hallyday, convaincant).

Jacques Kaminsky (Johnny, donc) est un ancien photographe (comme Lelouch l’a été dans sa jeunesse) qui tombe sous le charme de ce beau coin de montagne et sous celui de l’agent immobilier (Sandrine Bonnaire) qui lui vend le magnifique « domaine » situé à Praz-sur-Arly, près de Megève (Lelouch y possède aussi un chalet). Après avoir renvoyé sa dernière épouse beaucoup trop parisienne (Agnès Soral), Jacques convie son ami d’enfance et médecin personnel, Frédéric dit le toubib (Eddy Mitchell, décontracté). Mais Jacques aimerait tellement que ses quatre filles (de quatre femmes différentes, un peu comme les sept enfants du cinéaste…) soient à ses côtés que le toubib invente un gros mensonge pour réunir la smala. Les quatre amazones au prénom des quatre saisons débarquent ainsi au chevet d’un père trop bien portant, cigare aux lèvres et œil bleu perçant d’aigle (un volatile survole d’ailleurs le chalet…)

Johnny, Schmoll et toute la famille réunis sous le soleil et la musique de Georges Moustaki ne vont pas tarder à voir ce petit bonheur bientôt contrarié… Le film de Claude Lelouch revient à sa marque de fabrique que le cinéaste avait pourtant mise de côté avec le réussi « Roman de gare » (2007) tourné lui aussi à Praz-sur-Arly. Le cinéaste aime les femmes, aime les filmer, quels que soient leurs âges: les jeunettes (la jolie rousse Jenna Thiam, la grande blonde Pauline Lefèvre et la belle brune Sarah Kazemy), les quadra (Sandrine Bonnaire et les revenantes Irène Jacob et Valérie Kaprisky) et même les petits-enfants (dont la fille du cinéaste).

Les images sont magnifiques, les plans savamment orchestrés, les dialogues totalement banals mais assez drôles, les crises de pleurs succèdent forcément aux crises de rires et la petite musique du cinéaste s’enclenche sans grande surprise. Comme nombre de films de Lelouch, « Salaud, on t’aime » possède pourtant un certain charme… agaçant. On y replonge à chaque fois.