Hans Jürgen Höss a 87 ans. Résidant en Allemagne, il est le fils de Rudolph Höss, le commandant d’Auschwitz. Anita Lasker-Wallfisch, 98 ans, est une survivante du camp d’extermination. Près de 80 ans après la libération du camp par les Russes, ils se rencontrent à Londres pour la première fois.
Produit par la Warner Bros., L’Ombre du commandant peut être mis en parallèle avec La Zone d’intérêt (Jonathan Glazer, 2024), devenu un des films majeurs sur la Shoah. Très pédagogique et destiné au plus grand nombre, le documentaire de l’anglo-argentino-allemande Daniela Völker rappelle les crimes du IIIe Reich et le génocide – 6 millions de Juifs assassinés – commis par les nazis.
L’intérêt de L’Ombre du commandant réside avant tout dans la rencontre organisée entre deux enfants d’Auschwitz: l’une à l’intérieur du camp, qui doit sa survie à la pratique du violoncelle qui servait à l’orchestre du camp; l’autre derrière le mur d’enceinte, dans la maison où vit la famille de Rudolph Höss. Si sa mémoire ne semble retenir que l’enfance heureuse du petit garçon qu’il était, Hans Jürgen Höss est aussi dans le déni. Jusqu’au jour où, accompagné de son fils Kaï, il visite pour la première fois le camp de la mort.
C’est surtout le témoignage d’Anita Lasker-Wallfisch qui retient l’attention: d’une lucidité confondante, peu étonnée de la résurgence actuelle de l’antisémitisme, la violoncelliste née dans une famille juive de Breslau (aujourd’hui en Pologne) et qui réside désormais en Angleterre, livre un témoignage glaçant sur l’âme humaine. Rien que pour écouter ses phrases sèches et voir son visage déterminé, L’Ombre du commandant, qui use d’effets esthétiques formatés pour le petit écran, mérite amplement d’être découvert.
La cinéaste pose la question, peu abordée, de l’héritage familial, qu’on soit descendant d’un criminel de guerre ou fille de déportée. Accablés par la culpabilité familiale, le petit-fils du criminel est désormais le pasteur d’une église évangélique. La fille de déportée, britannique, entreprend quant à elle de s’établir en Allemagne.
La scène finale de la rencontre entre Anita Lasker-Wallfisch et Hans Jürgen Höss, terriblement émouvante, laisse entrevoir la possibilité d’une Humanité meilleure.
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