Rome, début des années 1970. Luigi Comencini (Fabrizio Gifuni) est en plein préparatif de son film Les Aventures de Pinocchio, sous les yeux passionnés de sa fille Francesca. Pourtant, les relations père-fille se détériorent lorsque, quelques années plus tard, l’adolescente (Romana Maggiora Vergano) quitte le monde de l’enfance, terrain de prédilection de son cinéaste de père.

Francesca Comencini, l’une des deux filles du réalisateur de Casanova, un adolescent à Venise (1969), met en scène quelques moments de son enfance et adolescence, traversée par la recherche de paradis artificiels.

Dans le grand appartement de Rome, la petite fille, jouée avec tendresse par la toute jeune Anna Mangiocavallo, observe son père au travail puis, à la campagne, sur un plateau de cinéma. Père charismatique et épris de justice – il n’hésite pas à reprendre une maîtresse humiliante envers un camarade de sa fille ou à houspiller un régisseur qui parle mal aux figurants -, le fringuant père ne peut que susciter l’admiration de la petite fille. C’est lorsque la vie adulte s’offre à elle que la jeune femme prend ses distances avec son créateur, comme pour se dégager de son ombre trop encombrante.

La cinéaste Francesca Comencini suit ces deux âmes solitaires – ni frères, ni sœur et mère ne sont évoqués – le temps d’un double apprentissage: devenir adulte pour Francesca, l’accepter comme telle pour Luigi. Elle convoque le film d’apprentissage et la difficulté de se construire avec un père artiste. Et le vide ressenti lorsqu’on doit embrasser une voie personnelle.

Avec délicatesse, humour et émotion, Francesca Comencini dépeint une relation tendre, touchante et teintée d’onirisme – la scène finale est magique. Si la cinéaste rend un hommage certain à son père, elle livre également une lettre d’amour au cinéma en intégrant des séquences de films muets, sauvegardés par son père au sein de la Cinémathèque de Milan (Cineteca Milano), dont il fut le cofondateur avec Alberto Lattuada en 1947.

Fabrizio Gifuni (L’Enlèvement de Marco Bellocchio) et Romana Maggiora (récemment découverte dans Il reste encore demain de Paola Cortellesi) illuminent Il tempo che ci vuole dont le titre en France est Prima la vita, « la vie passe avant le cinéma » selon Luigi Comencini.