A Saumur, la discrète Eugénie (Joséphine Japy) vit dans l’ombre de son père Félix Grandet (Olivier Gourmet), un riche tonnelier et viticulteur. Le tyrannique bonhomme, pourtant riche comme Crésus, est d’une avarice confondante et impose à ses femme (Valérie Bonneton) et fille un train de vie plus que modeste. Pire, l’homme refuse de payer la dote de sa fille pour envisager de la marier.

Marc Dugain a une double actualité en cet automne 2021: la sortie de son touchant livre La Volonté (Gallimard) qui relate la vie de son père et l’adaptation au cinéma du classique de Balzac paru en 1834 qui évoque la relation d’un père et de sa fille.

Pourtant de facture très classique, le film de Marc Dugain est une réussite en tous points: d’abord par le choix du trio d’acteurs: Olivier Gourmet est impressionnant de monstruosité, Valérie Bonneton méconnaissable par la sobriété de son jeu et la lumineuse Joséphine Japy incarne, tout en silence et en regards, le rôle-titre du film. Depuis Le Moine (2011) de Dominik Moll, la sensible jeune femme effectue un parcours discret et sans faute. Sa beauté diaphane, son visage d’ange cachent une force et une détermination révélées dans la dernière partie du film qui voit, enfin, l’héroïne libérée du joug paternel. Les acteurs secondaires sont également très justes: César Domboy (Charles), Bruno Raffaelli (le notaire) ou encore Philippe du Janerand (l’abbé).

Ensuite le scénario qui nous plonge dans une ambiance provinciale étriquée et pathétique, parfois hilarante. Enfin, la beauté des décors et des costumes, sans décorum pompeux, sont d’une grande justesse.

Marc Dugain a distillé dans son adaptation le récit d’une femme qui lutte pour son émancipation, une lecture revisitée du combat des femmes d’aujourd’hui. Pourquoi pas? On aime qu’un auteur s’empare d’un classique de la littérature et en donne une vision personnelle et pertinente. Depuis Une Exécution ordinaire, le cinéaste Marc Dugain sait qu’il peut compter sur un public curieux de ses récits.

Eugénie Grandet, un film de Marc Dugain avec Joséphine Japy

Ci-dessus: César Domboy et Joséphine Japy.