France de Meurs (Léa Seydoux) est la journaliste-star d’une grande chaîne d’information. Ambitieuse et froide, la séduisante jeune femme aime se mettre en scène dans ses reportages couvrant l’actualité brûlante de notre monde: guerres, conflits, drame des réfugiés… Sa vie personnelle n’est pas aussi rayonnante que l’est son aura médiatique: son mari (Benjamin Biolay) – « qui gagne cinq fois moins d’argent qu’elle » – l’irrite profondément et leur fils délaissé dans le grand appartement de la place des Vosges reste rivé sur les écrans. Un événement pourtant anodin va rendre la journaliste plus humaine et consciente de la mauvaise pièce de théâtre qu’elle joue. Mais pour combien de temps?

Avec ce nouvel opus aussi différent que ses dernières réalisations l’étaient – l’excellent Jeanne (2019) ou l’hilarant Ma loute (2016) – Bruno Dumont nous livre avec France une critique acerbe du métier de journalistes de télévision, pervertis par notre société de la consommation et de la promotion permanente qui participent au triomphe de la vulgarité, incarnée ici par Lou (Blanche Gardin). Très drôle et volontairement caricatural – Bruno Dumont a toujours excellé dans l’humour loufoque avec des protagonistes dotés de trognes hilarantes -, le film est aussi le portrait intime et psychologique d’une femme qui n’avait certainement pas pleuré depuis longtemps. Cette femme en larmes est interprétée par Léa Seydoux, magistrale, qui trouve ici son plus grand rôle depuis La Vie d’Adèle (2013). Extrêmement séduisante alors qu’elle n’est pas forcément à son plus bel avantage dans ses tenues voyantes, l’actrice – sans jamais séduire les spectateurs que nous sommes – dégage une émotion intense.

Étonnant et superbement mis en scène – les vues sur Paris ou la côte d’Azur sont à couper le souffle – France est d’autant plus émouvant qu’on entend pour la dernière fois une musique hypnotique composée par le regretté Christophe – également acteur et musicien sur Jeanne – disparu en 2020.