Piémont, début du XXe siècle. Luigi et Cesira Ughetto décident de quitter Ughettera, leur village de montagne, où le dures conditions de vie ne permettent plus de nourrir leurs enfants. Après un voyage avorté vers les Etats-Unis, la petite famille s’installe en France où, en passant par l’Ariège et la Drôme, elle s’établit au Paradis, leur maison près du barrage en construction de Génissiat, où Luigi y est devenu contremaître.
Avec son titre qui rappelle les pires heures de la xénophobie et du racisme, Interdit aux chiens et aux Italiens narre l’épopée magnifique d’une famille pauvre d’agriculteurs, devenus ouvriers sur les routes, les ponts, et les barrages de Suisse et de France. Exilés à jamais de leur Italie natale tombée sous le joug du fascisme, ces milliers d’ouvriers, main d’œuvre robuste et docile, rêvent d’un monde meilleur pour leurs descendants.
Le talentueux conteur et réalisateur de ce film en stop-motion, le procédé utilisé également dans L’Île aux chiens (2018) de Wes Anderson, aborde l’histoire familiale et l’Histoire de l’immigration italienne sous l’angle de l’intime, à travers un dialogue fictif entre sa grand-mère Cesira et lui. C’est elle qui raconte, avec la douce voix d’Ariane Ascaride, le départ douloureux, les deux guerres et les conditions précaires des ouvriers. Le destin d’une vie, marquée par des drames, des bonheurs trop fugaces et l’irrépressible désir de posséder un petit lopin de terre pour y installer son toit.
Alain Ughetto, avec ses petites marionnettes et ses décors en carton, nous rappelle magistralement le passé de beaucoup des aïeux qui constituent aujourd’hui le terreau de la France. Son magnifique film, poignant et drôle, transcende l’histoire familiale pour proposer une réflexion sur la condition des migrants d’aujourd’hui, à qui il dédie d’ailleurs son film humaniste mis en musique par le grand compositeur Nicola Piovani.
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