Dans les années 1920 dans un village du Bengale, Sarbajaya (Karuna Bandyopadhyay) et son mari occupent la demeure ancestrale de ce dernier. Parents de deux enfants, Durga et Apu, le couple subvient difficilement au besoin de la famille qui héberge également une vieille tante, Indir. Le manque de revenu pousse Harihar (Kanu Banerjee) à se rendre durant de longues périodes à Bénarès pour y travailler. Pendant ce temps, Apu et sa grande sœur aident leur mère à tenir la maison en décrépitude, en attendant l’inquiétant orage.

Premier film de Satyajit Ray (1921-1992), le plus illustre des cinéastes indiens en Occident, La Complainte du sentier, tourné en 1955, ressort en version restaurée dans les salles obscure ainsi que simultanément en coffret DVD et Blu-ray chez Carlotta. C’est aussi le premier volet d’une trilogie tirée de l’autobiographie du romancier bengali Bibhutibhushan Bandopadhyayi que le cinéaste du Salon de musique (1958) s’est emparée.

Entre fulgurances poétiques et réalisme de la vie quotidienne, le cinéaste offre avec Pather Panchali le récit touchant et dramatique, d’une famille frapée par la pauvreté. Si au loin on entend et bientôt aperçoit la modernité incarnée par un convoi ferroviaire qui traverse les champs et annonce le départ vers la ville, l’action du film se passe presque exclusivement dans et autour d’une maison familiale en ruines, que le père, descendant d’une caste d’intellectuels, peine à abandonner. A travers le beau regard du jeune Apu (Subir Bannerjee), le spectateur observe la déliquescence d’une famille irrémédiablement vouée à l’exode.

Bercée par la musique de Ravi Shankar, la chronique rurale de Satyajit Ray ne peut que déchirer le cœur des spectateurs qui y verront le constat amer d’une ruralité abandonnée au profit de la ville moderne. Des passages plus heureux ponctuent ce film naturaliste et contemplatif – une étonnante scène dans une école où le professeur fait également office de commerçant – qui imprègnent durablement les esprits.