Un village en Sicile. Durant la chaleur d’une après-midi, Peppino Califano (Aldo Puglisi), un jeune étudiant promis à Matilde Ascalone, profite de la sieste de cette dernière pour abuser de sa sœur, la jeune Agnese (Stefania Sandrelli). Lorsque Don Vincenzo Ascalone (Saro Urzì), le père des filles, apprend le déshonneur de la famille, il contraint Peppino à épouser Agnese.

Après l’exquis Divorce à l’Italienne (1961), le cinéaste Pietro Germi retrouve dans Séduite et abandonnée, sorti en 1964, l’adolescente qui faisait déjà tourner la tête de Marcello Mastroianni, la toute jeune Stefania Sandrelli. Ici en tête d’affiche, l’actrice est confondante de beauté. Subissant les avances de son beau-frère, le personnage avant-gardiste d’Agnese fait partie de ces premières femmes à s’affranchir de la loi des hommes en s’opposant à la loi des hommes, obsédés par la pureté des femmes. Jusqu’à briser les plans du patriarche, obsédé par la rumeur et les apparences. Ici, dans cette Italie du sud où l’Eglise est omniprésente, l’honneur est religion.

Entre farce et drame familial, Pietro Germi et les talentueux et prolifiques scénaristes Age et Scarpelli suivent la lutte de sa jeune héroïne, abusée et violentée par les hommes – dont son père interprété par le génial Saro Urzì – pour retrouver sa dignité. Soixante ans plus tard, Séduite et abandonnée offre un nouveau regard, étonnamment précurseur, sur un système patriarcal qui ne cesse – encore aujourd’hui – de soumettre les femmes.

Dans une superbe pellicule en noir et blanc et sur une musique de Carlo Rustichelli, cette comédie féroce que nous offre le distributeur Tamasa dans une version restaurée en 4K et au sein d’une trilogie sicilienne du cinéaste, est à redécouvrir absolument. Et ouvrira les portes du succès à la grâcieuse Stefania Sandrelli dans Je la connaissais bien (Antoni Pietrangeli, 1965), Un vrai crime d’amour (Luigi Comencini, 1974) ou encore Nous nous sommes tant aimés (Ettore Scola, 1974).

Séduite et abandonnée de Pietro Germi