Bertrand Tavernier a puisé dans la littérature une grande partie de sa filmographie depuis son premier opus « L’Horloger de Saint-Paul » tiré d’un roman de Georges Simenon. Après l’excellent polar halluciné « Dans la brume électrique » et la fougueuse « Princesse de Montpensier » , le cinéaste revient là où on ne l’attendait pas: l’adaptation d’une bande-dessinée à succès de Christophe Blain et Abel Lanzac.

Le film retrace les quelques jours d’un bouillonnant cabinet du ministre des Affaires étrangères à la veille d’une possible intervention des États-Unis au Loudmékistan. Le ministre Alexandre Taillard de Worms (Thierry Lhermitte) va chercher auprès de sa jeune plume Arthur Vlaminck (Raphaël Personnaz) les mots les plus forts, les plus nobles et les plus persuasif pour convaincre l’ONU de l’inutilité d’un conflit armé.

Cette comédie plutôt réussie (la transposition sur grand écran d’une BD n’est jamais aisée) est génialement portée par une tornade nommée Thierry Lhermitte: l’acteur, qu’on redécouvre, n’a pas cherché à imiter Dominique de Villepin mais, au contraire, compose un personnage survolté, insupportable et irrésistible à la fois. Les meilleurs moments du film sont ceux, nombreux, où Lhermitte envahit totalement l’espace.

Le film de Tavernier est malheureusement plombé par quelques artifices « à la papa » comme les feuilles qui s’envolent au passage du ministre ou la mièvrerie de la jolie Marina, la compagne d’Arthur (la charmante Anaïs Demoustier déçoit ici, elle qui illuminait les ambigus « Elles » ou « L’Enfance du mal » ).

La comédie de Tavernier distille néanmoins une certaine amertume: tout ce petit monde de l’ombre, en particulier Maupas (Niels Arestrup), directeur du cabinet du ministre des Affaires étrangères et indispensable conseiller, s’éreinte pour la seule carrière de leur ministre, despote en son ministère.