C’est dans le train qui les mène à Paris que deux amis d’enfance, les américains George et Thomas, font la connaissance de leur délicieuse compatriote Gilda. Alors qu’ils sont tous trois endormis dans le compartiment, les jambes étendues du trio se croisent et s’enlacent sur la banquette comme pour annoncer le lien intime qui les unira. Tous les trois.
Arrivée dans la capitale française, l’indécise Gilda Farrell, qui avait pourtant passé un gentleman’s agreement avec ses deux nouveaux compagnons (« no sex »), s’adonne finalement aux bras de l’un puis de l’autre. Jusqu’au jour où, convoité par l’ennuyeux Max Plunkett, Gilda accepte la proposition de mariage du riche publicitaire.
« Sérénade à trois » est l’adaptation d’une pièce à succès de Broadway, signée du britannique Noel Coward et contemporaine de sa version cinématographique de 1933. Avant-gardiste et féministe, Ernst Lubitsch annonce l’ère de la femme indépendante qui exprime librement son désir féminin et ses choix sexuels. Le cinéaste des succulentes et décidément intemporelles comédies (citons « Haute pègre » , « La Huitième femme de Barbe-Bleue » ou « Ange » , récemment restaurés et distribués par Splendor Films), encore et toujours à l’honneur dans les salles obscures près de 80 ans après leurs sorties, filme dans « Sérénade à trois » la vie de jeunes gens qui refusent les carcans de la morale, même si – pour reprendre une citation du conservateur Plunkett – « l’amoralité est peut-être amusante, mais pas suffisamment pour remplacer une vertu parfaite et trois repas par jour ».
Justement, Lubitsch prône la jouissance: sa Gilda (interprétée par la pétillante Miriam Hopkins) refuse de choisir entre George le peintre (Gary Cooper) ou Thomas le dramaturge (Fredric March). C’est avec les deux hommes que s’épanouit pleinement sa féminité. A l’heure où on parle du triolisme et de la pansexualité, le génial Lubitsch annonçait dans son oeuvre le féminisme et l’épanouissement sexuel.
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