C’est une femme laide et vieillie qui interpelle un beau matin l’un des passagers d’un autobus, Nino Monti (Marcello Mastroianni), pour lui demander 100 lires. Serait-ce Anna Brigatti (Romy Schneider), la superbe femme avec qui il a vécu un amour passionné il y a de cela une vingtaine d’années? Pourtant, alors qu’il relate cette histoire, ses amis lui confirment qu’Anna Brigatti est morte. Pendant ce temps-là dans la ville, un crime a lieu…

Nouvelle reprise des œuvres des années 1980 de Dino Risi, Fantôme d’amour est à des années-lumière de ses comédies sociales et grinçantes à l’instar de sa plus célèbre, Le Fanfaron (1962). Dans ce film tourné dans les ruelles brumeuses et les appartements bourgeois de Pavie, on suit un homme mûr, délicatement interprété par Marcello Mastroianni, enfermé dans sa vie ennuyeuse de notable provincial. C’est la vision de son ancienne maîtresse et les souvenirs d’une liaison passionnée qui vont provoquer l’éclatement de sa vie réelle au profit d’un monde révolu et fantasmé. Jusqu’à tomber dans la folie.

Dino Risi (1916-2008), avant d’être le grand et prolifique cinéaste transalpin, étudiait la médecine et a même suivi des patients à l’hôpital psychiatrique de Voghera. Dans Fantôme d’amour, on sent l’influence de l’ancien étudiant en médecine qui observe une société neurasthénique et étouffante qu’un grain de sable peut déstabiliser. Ce petit événement à l’origine de tout, c’est une femme, superbe Romy Schneider dans un de ses derniers rôles, qui redonne vie à son ancien amant et l’entraîne à franchir le fleuve Styx pour s’échapper de l’enfer…

Photographie magnifiée de Tonino Delli Colli, musique obsédante de Riz Ortolani, face-à-face sublime entre deux anciens jeunes premiers entrants dans l’âge mûr, Romy Schneider et Marcello Mastroianni… Fantôme d’amour est une œuvre nostalgique et fantastique, rééditée par Pathé en version restaurée – en même temps que Cher papa (1979) -, qu’il faut découvrir parmi les innombrables bijoux cinématographiques que nous a laissés Dino Risi.