Bouffon? Pervers? Mafieux?

Et si Silvio Berlusconi, qui fut président du Conseil des ministres italien à trois reprises, était autre chose que l’homme autant adulé que honni? Et si, derrière l’homme politique aux multiples scandales, se cachait un être tout aussi complexe que complexé?

Dans sa villa de Sardaigne, Silvio Berlusconi, incarné par le génial Toni Servillo, opère son retour à la vie politique en briguant un troisième mandat de la présidence du Conseil. A 70 ans, plus fringuant que jamais, l’homme voit son couple se déliter tandis que, inconditionnel noceur, une grande fête se prépare dans sa villa.

Le film de Paolo Sorrentino est un véritable piège: alors que la première partie de « Silvio et les autres » se concentre sur d’ambitieux personnages, cocaïnomanes, fêtards et retords, prêts à tout pour rencontrer le Cavaliere et, tels des parasites, embrasser une carrière politique, la seconde partie opère un étonnant portrait psychologique d’un homme que la conquête du pouvoir fait vivre. Derrière les frasques, une âme complexe.

Les fêtes orgiaques, les drogues à gogo, les sublimes femmes dénudées dansant autour de la piscine ne sont que la partie émergée de « l’iceberg Berlusconi ». L’homme aux multiples lifting et aux célèbres implants capillaires, amoureux des jeunes femmes, est surtout un enfant de l’Italie d’après-guerre. Parti de rien, vendeur dans l’âme – une scène de télévente mémorable ponctue le film – Silvio Berlusconi est un homme complexé qui a dépassé sa condition et assuré une revanche sur la vie.

Le cinéaste de « La Grande Bellezza » et de « Il Divo » possède un talent indéniable de mise en scène et s’amuse (trop?) dans les nombreuses scènes festives des luxueuses villas italiennes. C’est certainement pour mieux perdre son spectateur et le renvoyer brutalement dans la face ombrageuse de l’homme Berlusconi. Souriant, grimaçant, chantant, blaguant et même prêtant serment, Toni Servillo est magistral en Silvio Berlusconi. Même si la ressemblance physique n’est pas frappante, ses mimiques et son jeu transcendent l’homme public.