Auréolé de la Palme d’or à Cannes avec Une Affaire de famille en 2018, Hirokazu Kore-eda poursuit ses beaux portraits d’une enfance qui lui tient à cœur. On se rappelle Still walking (2009), Tel père, tel fils (2014) ou le touchant Notre petite sœur (2015) qui explorent chacun les liens familiaux et filiaux de ses protagonistes. Dans son nouvel opus, le cinéaste japonais suit les troubles du jeune Minato (Soya Kurokawa), fils unique de Saori Mugino (Sakura Andō) qui l’élève seule depuis la disparition du mari et père. Le jeune adolescent semble être le souffre-douleur de son professeur M. Hori (Eita). Où bien serait-il à l’école « le monstre » que sa mère refuse de voir?
Avec L’Innocence, dont le titre original est Monster et qui a remporté à Cannes 2023 le Prix du scénario, Hirokazu Kore-eda réalise une œuvre en trompe-l’œil, construite comme un puzzle en trois parties: le même fait – une série d’événements concernant un professeur et deux camarades d’école – est raconté de trois points de vue: la mère de Minato, l’instituteur et le jeune garçon lui-même. Ce dispositif virtuose, qui n’est évidemment pas sans rappeler Rashomon (Akira Kurosawa, 1952), permet de s’immiscer dans les mystères de l’enfance qui échappent forcément au monde des adultes.
D’une tendresse inouïe avec ses personnages, le cinéaste évoque les non-dits et l’impossibilité de communiquer. Les amours interdits et la violence de la société – adultes et enfants – sont abordés avec finesse, sans pour autant faire de L’Innocence un film de société. Longtemps, on gardera en tête le visage de ces enfants et leurs échappées imaginaires dans la montagne verdoyante où, au bout de la voie ferrée désaffectée, ils acquerront peut-être une lueur de liberté.
Ci-dessus: L’Innocence à l’affiche de l’UGC Rotonde à Paris.
Laisser un commentaire