Dans la foulée de la ressortie du Lit conjugal (1963), le premier film tourné en Italie par l’iconoclaste Marco Ferreri et déjà interprété par le truculent Ugo Tognazzi, l’éditeur et distributeur Tamasa offre aux spectateurs des salles obscures la version restaurée du dérangeant Mari de la femme à barbe sorti sur les écrans français en 1964 et injustement boudé.
La version française de cette coproduction franco-italienne (Les Films Marceau-Cocinor et Carlo Ponti) présente d’ailleurs une fin totalement différente et moins radicale que la version italienne, celle voulue par le cinéaste et censurée par la production. Sur les écrans comme dans le combo Blu-ray DVD édité également par Tamasa, les deux fins sont proposées, au spectateur de choisir sa préférée.
Sur le thème « les monstres ne sont pas ceux qu’on croit », Marco Ferreri (1928-1997) pousse la réflexion – et le spectacle – jusqu’à l’excès mêlant l’humour noir et le sarcasme. Car évidemment, le phénomène de foire n’est pas cette malheureuse femme à barbe (Annie Girardot) que recueille dans un hospice napolitain Antonio Foccacia (Ugo Tognazzi), un imprésario raté. A la recherche permanente de profits, l’amoral Antonio épouse Maria et utilise sa particularité pileuse – et sa naïveté – en la montrant comme une bête de foire devant le public ou en la convaincant de passer quelques jours auprès d’un étrange professeur, prêt à payer pour assouvir sa perversion.
La Donna scimmia, la femme-singe dans sa traduction originale, mêle la farce et l’étude des hommes dénués d’humanité dans cette époque des Trente glorieuses où le profit et le consumérisme écrasent tout – et encore plus aujourd’hui – sur leur passage.
Le Mari de la femme à barbe ne serait pas l’indémodable pépite qu’on redécouvre sans ses géniaux interprètes, Annie Girardot et Ugo Tognazzi, génial de cynisme. Un acteur dont on ne se lasse pas d’admirer depuis les ressorties de Venez donc prendre le café chez nous d’Alberto Lattuada (1970) ou Dernier amour (1978) de Dino Risi.
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