Le cinéma bis revient au devant de la scène depuis quelques années avec la restauration d’un patrimoine oublié au fond des tiroirs et désormais réédité en Blu-ray et DVD par de jeunes aventuriers du Septième art. Le Grand silence de Sergio Corbucci, qui bénéficie également d’une ressortie en salles grâce aux Acacias, est l’exemple même d’un western spaghetti, dont il reprend tous les codes, réhabilité par la critique qui n’avait longtemps d’yeux que pour le maître Sergio Leone. Un nouveau public peut désormais découvrir sur grand écran l’un des (nombreux) films de chevet de Quentin Tarentino.
Le touche-à-tout et prolifique Sergio Corbucci ( réalise en 1968 l’étonnant Il Grande silenzio qui bénéficie d’un casting international tout aussi étonnant: le français Jean-Louis Trintignant, l’allemand Klaus Kinski – habitué des films de genre et des coproductions européennes – et les américains Vonetta McGee et Frank Wolff. Si Le Grand silence ne révolutionne pas le genre du western spaghetti et n’atteint pas la maîtrise de Sergio Leone, il y apporte cependant une touche personnelle et mémorable: des paysages enneigés de montagne, une étreinte « métissée » entre le héros Silenzio (Jean-Louis Trintignant) et Pauline (Vonetta McGee) ainsi qu’un final sanglant où « le méchant » remporte le duel.
Dans l’Utah, en 1898, des paysans affamés par un hiver glacial pillent les villages de montagne pour survivre. Grâce à une loi qui permet une prochaine amnistie, les villageois hors-la-loi descendent de leurs caches pour se rendre. Des chasseurs de prime, menés par le cruel Tigrero (Klaus Kinski), utilisent le cadre légal mis en place pour les capturer. Plutôt morts que vifs. C’est alors que la belle Pauline demande au mystérieux Silenzio de venger la mort de son mari, froidement abattu par le chef de bande.
Avec sa réalisation très marquée et parfois datée – zooms par à-coups, gros plans, montage nerveux et postsynchronisation aléatoire – Le Grand Silence ne manque cependant pas de qualités. Les interprètes remplissent parfaitement la feuille de route: tandis que le héros des transalpins Fanfaron (1962) et Conformiste (1970) Jean-Louis Trintignant, impassible et muet durant tout le film, affiche un visage qu’on ne lui connaissait pas, Klaus Kinski, d’une douceur étonnante, surabonde de cynisme et de cruauté.
La montagne est peut-être le personnage principal du Grand silence, qui tire son titre du calme que laisse derrière lui le tueur Silenzio. Et des contrées blanches et silencieuses de l’Utah où est censée se dérouler l’action que trahissent des fermes alpines: Sergio Corbucci a effectivement posé sa caméra plus proche de Rome que de Salt Lake City. Les magnifiques massifs des Dolomites enneigés et la région de Cortina d’Ampezzo servent de cadre au septième des treize westerns tournés par l’auteur de Django (1966).
Malgré sa cruauté, le final du Grand Silence est superbe.
Ci-dessus: Le Grand silence à l’affiche du Max Linder Panorama à Paris.
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