Adresse: 36 avenue des Champs-Elysées à Paris (8ème arrondissement)
Nombre de salles: 1
Après le cinéma Colisée, poursuivons notre promenade sur les Champs-Elysées, à une époque où la prestigieuse avenue comptait un grand nombre de salles obscures.
Le Broadway, un cinéma mono-écran de 375 fauteuils, a été inauguré le 21 octobre 1936. C’est sous l’enseigne Cinéphone-Petit Journal que le cinéma accueille ses premiers spectateurs. La salle fait partie du réseau Cinéphone qui possède des cinémas programmant des films d’actualités. Le Cinéphone des Champs-Elysées est présenté par le quotidien Le Petit Journal comme le « complément heureux de ses éditions quotidiennes ».
Le Cinéphone, un cinéma spécialisé dans les films d’actualités.
L’écran panoramique de la salle est l’atout de ce cinéma flambant neuf considéré comme « un nouveau point de mire au rond-point ». La salle propose ainsi la revue filmée du monde ainsi que divers petits films. Pour son ouverture, le Cinéphone propose « Le Lycée Papillon » chanté par Georgius ainsi que le documentaire « Course de lévriers ». Suivent deux cartoons de Walt Disney « Les Trois petits chats » ainsi qu’un épisode de Mathurin (le nom français de Popeye) « Quoi? Des épinards? » et pour terminer le court-métrage en couleurs « Terre sans hommes ».
Ci-dessus: le pavé d’ouverture du Cinéphone Petit-Journal le 21 octobre 1936.
Lors de la soirée d’inauguration, Léo Lagrange, sous-secrétaire d’Etat aux Loisirs, déclare au quotidien Le Petit Journal: « Il est bon qu’aux heures de liberté, les hommes aient la joie de voir ce qui se passe dans le monde ». Et le quotidien de préciser « chacun s’extasie sur l’éclairage varié de la salle que dispensaient des kilomètres de néon dissimulés dans des gorges murales ».
Dès 1937, plusieurs salles d’actualités ouvrent dans différents quartiers de la capitale et le Cinéphone Petit Journal adopte l’enseigne de Cinéphone Champs-Elysées. Le cinéma propose désormais, en complément des actualités, un grand film chaque semaine. Les autres salles Cinéphone (Italiens, Montmartre et Rochechouart) affichent, parfois simultanément avec la salle des Champs-Elysées, le même film. Durant l’Occupation, la programmation d’une production en simultané avec les salles Cinéphone a toujours lieu.
C’est à la Libération que le Cinéphone-Elysées affiche les productions américaines invisibles quelques mois plus tôt. Suivent les films tournés par la Columbia dans la période 1940-1944. Le premier grand succès de cette période d’après-guerre est « Le Porte-avions X » réalisé par Henry Hathaway pour les studios de la Fox.
Le Cinéphone-Elysées devient le Broadway.
La nouvelle enseigne du cinéma est inaugurée avec la sortie le 3 juillet 1947 de « Kitty Foyle » réalisé par Sam Wood pour la RKO. Suit le 20 novembre 1946 le succès commercial de la Paramount « Madame et ses flirts » (The Palm Beach Story) de Preston Sturges.
La ligne éditoriale du Broadway change et, à l’instar des cinémas élyséens Lord Byron et L’Avenue, les films proposés sont majoritairement en exclusivité unique.
Ci-dessus: la façade du cinéma Broadway en 1946 avec à l’affiche « L’Impossible amour » réalisé par Vincent Sherman avec Bette Davis.
Cette période d’après-guerre va être l’occasion de programmer un certain nombre de films américains dont certains sont aujourd’hui des grands classiques. Parmi eux, le Broadway affiche le 31 juillet 1946 « Le Faucon maltais » de John Huston, « Une Nuit à Casablanca » de Archie Mayo avec les Marx Brothers le 17 avril 1947, « Les Bourreaux meurent aussi » de Fritz Lang le 28 août 1948, « La Dame de Shanghai » d’
Avec le film « Passeport pour Pimlico » réalisé par Henry Cornelius que la Gaumont distribue en seule exclusivité le 7 décembre 1949 au Broadway s’ouvre une période de films en longue exclusivité. Se succèdent ainsi le 29 décembre 1950 « Quand la ville dort » de John Huston, « Eve » de Joseph L. Mankiewicz le 27 avril 1951 qui reste à l’affiche vingt-deux semaines et « La Lune était bleue » d’Otto Preminger le 25 septembre 1953 qui tient douze semaines au Broadway. Le cinéma Broadway devient une salle de référence grâce à la qualité de ses programmes.
Ci-dessus: la salle du Broadway rénovée en 1956 par Georges Peynet.
Ci-dessus: le nouveau hall du Broadway en 1956.
Durant l’été 1956, la société Cinéphone propriétaire du Broadway effectue une rénovation de la salle sous la houlette de « l’architecte des cinémas » Georges Peynet. La revue Le Film français commente ainsi la modernisation de la salle des Champs-Elysées: « Les murs ont été habillés d’un grand panneau d’amiante. Le balcon est inséré dans ce grand panneau. Les murs sont drapés de soie de verre, les soubassements sont revêtus de moquette. L’écran a été agrandi au maximum; pour cela le rideau de scène a été disposé à la romaine. Les couleurs ont été choisies de manière à rester dans une note jeune: l’amiante est bleue avec impression bleu clair, les murs sont jaune souffre ainsi que le rideau à la romaine, les fauteuils sont bleus, les soubassements et la moquette gris. »
La Paramount entreprend la sortie le 14 décembre 1956 de « Guerre et Paix », le long film de King Vidor en version originale et en roadshow (avec entractes) dans deux salles des Champs-Elysées: le Triomphe et le Broadway. Le film reste vingt-quatre semaines à l’affiche et enregistre 123 915 entrées rien que pour le Broadway. La version française du film sort dans la foulée dans les salles du circuit Paramount.
Le chef d’oeuvre du cinéma transalpin « Le Pigeon » est en exclusivité à l’affiche au Broadway à partir du 11 septembre 1959. Mais après onze semaine d’exploitation du film de Mario Monicelli, le Broadway ferme définitivement ses portes. La dernière séance de ce cinéma a lieu dans la soirée du 1er décembre 1959. Deux mois plus tôt, à quelques pas de là, Gaumont inaugure sur l’avenue des Champs-Elysées l’un de ses plus beaux complexes cinématographiques: l’Ambassade.
Textes et documents: remerciements M. Thierry Béné.
Documents issus du Film français et de la Cinématographie française.
Ci-dessus: « Guerre et Paix » à l’affiche du cinéma Broadway le 14 décembre 1956.
Ci-dessus: « Titanic » de Jean Negulesco à l’affiche du cinéma Broadway le 18 mars 1955.
Ci-dessus: « Une Femme qui s’affiche » de Georges Cukor à l’affiche du cinéma Broadway le 1er avril 1954.
Ci-dessus: « L’Or de Naples » à l’affiche du cinéma Broadway le 13 mai 1955.
Merci Claude. A noter que le Brodway jouxtait le Colisée-Gaumont. A bientôt.
Bon et utile dossier bien illustré.
Mais l’attitude de Gaumont laisse planer un certain malaise…