Lorsque la guerre est déclarée le 3 septembre 1939, la plupart des cinémas ferment leurs portes en raison du manque de personnel, conséquence de la mobilisation générale. Pour le circuit Gaumont, seuls restent ouvert les cinémas Gaumont-Théâtre, Palais-Rochechouart, Tivoli et Montrouge-Palace.
En outre, depuis le mardi 5 septembre, par ordonnance de la Préfecture de Police et à la demande de l’autorité militaire, les cinémas sont contraints de fermer leurs portes à 20h30, à l’instar des autres établissements de spectacles. Établies en fonction des places disponibles dans les abris autour du cinéma, les jauges ne doivent pas dépasser 300 personnes maximum, un chiffre fixé par le Gouvernement et la Commission de la Défense Passive. Selon La Cinématographie française, une chute de 50 à 60% des recettes est alors enregistrée.
La réouverture en temps de guerre.
En ce mois de septembre 1939, les Actualités sont désormais produites en commun par les principales maisons spécialisées : Gaumont, Pathé, Éclair, Fox-Movietone et Paramount. Visées par la censure, « les actualités seront identiques dans toutes les salles et fourniront au public une parfaite documentation sur les événements du monde entier » comme le précise le quotidien L’Intransigeant du 17 septembre.
Ci-dessus: réouverture le 6 décembre 1939 avec Derrière la façade (Georges Lacombe et Yves Mirande).
A la suite d’une enquête prescrite durant l’automne par le préfet de Police, la jauge au Gaumont-Palace a été augmentée à 2 500 places. Le vaisseau de la Place Clichy peut ainsi rouvrir ses portes le mercredi 6 décembre 1939 avec à l’affiche Derrière la façade, le « film aux 20 vedettes » réalisé par Georges Lacombe et Yves Mirande. Les attractions sur scène voient le retour du Grand Orchestre du Gaumont-Palace et de la célèbre troupe Carletti à laquelle appartient l’actrice Louise Carletti (1922-2002). L’horaire du couvre-feu ayant été retardé, le spectacle est permanent de 14 à 23 heures. Cette réouverture effectuée à titre d’expérimentation, la S.N.E.G. décide de tester la mise en place d’un service d’autobus pour la fin de la séance de nuit.
Le Gala d’ouverture, le 6 décembre au soir, est donné au profit des œuvres de la Croix-Rouge Française. Mobilisé, le chef d’orchestre du Gaumont-Palace Georges Tzipine est remplacé à son pupitre par M. Van de Walle.
La réduction du personnel mobilisé, la diminution de l’éclairage des façades, les jauges réduites, les frais d’entretien trop dispendieux et l’instauration du couvre-feu rendent l’exploitation difficile. Une importante érosion des recettes est observée. C’est durant cette période de restriction d’électricité que des panneaux peints sont apposés sur l’immense façade pour annoncer le film à l’affiche. Le Gaumont-Palace gardera l’utilisation de ces panneaux peints jusqu’à sa fermeture. Signe des temps, les abris les plus proches indiqués aux spectateurs apparaissent même dans les programmes.
Ci-dessus: liste des abris autour du Gaumont-Palace dans le programme du cinéma.
La semaine du 13 décembre 1939, l’affiche annonce La Fin du jour (Julien Duvivier), celle du 20 décembre La Grande farandole (Henry C. Potter) avec l’inoubliable duo Fred Astaire et Ginger Rodgers et pour les fêtes de fin d’années à partir du 27 décembre Le Chasseur de chez Maxim’s (Maurice Cammage) avec le comique Bach.
En accord avec le Gouverneur militaire de Paris, le préfet de Police autorise une ouverture exceptionnelle des établissements les 24 et 31 décembre 1939 jusqu’à 2 heures du matin.
Ci-dessus: Noël 1939 au Gaumont-Palace.
Le 29 décembre, les quotidiens Le Petit Parisien et L’Excelsior organisent au Gaumont-Palace l’arbre de Noël pour les enfants des collaborateurs. Le spectacle est présenté par M. André Cassin, Directeur du conservatoire des « Gosses de la butte ». Un buffet est dressé dans les couloirs proposant boissons et friandises aux enfants « propres à adoucir les premières heures de 1940 » comme le rapportent les deux quotidiens !
En janvier 1940, le Préfet de Police, en accord avec le Général Gouverneur Militaire de Paris, fait savoir que la fermeture des établissements de spectacles, cafés et restaurants, précédemment fixée à 23 heures est désormais fixée à minuit. Au Gaumont-Palace, malgré les événements, la S.N.E.G. décide que la formule d’Attractions et Orchestre de la salle peut se poursuivre, La Cinématographie française précisant que « c’est le seul cinéma qui occupe actuellement quarante musiciens ».
Les spectateurs se déplacent au Gaumont-Palace pour découvrir Entente cordiale (Marcel L’Herbier) la semaine du 3 janvier 1940, son exploitation ayant été suspendue lors de la semaine où la guerre fut déclarée. Suivent Les Aveux d’un espion nazi (Anatole Litvak) avec Edward G. Robinson le 31 janvier, Le Capitaine Benoît (Maurice de Canonge) avec Jean Murat et Mireille Balin le 28 février 1940, Seuls les anges ont des ailes (Howard Hawks) avec Cary Grant et Rita Hayworth le 13 mars 1940 ou bien L’Émigrante (Leo Joannon) avec Edwige Feuillère.
Le 12 mars 1940, la presse annonce que toutes les vedettes préférées du public – Édith Piaf, Ray Ventura et ses collégiens, Jeanne Aubert, Yvonne Gall de l’Opéra… – se produiront au Gaumont-Palace pour un gala au bénéfice de l’œuvre Pour nos soldats : « Oui, vous les retrouverez telles que vous les avez aimées au début de leur carrière » soutient la presse.
En mai 1940, la Préfecture de Police de la Seine annonce que les cinémas, théâtres et cafés doivent à nouveau fermer leurs portes avant 23 heures. Dans les colonnes de La Cinématographie française du 25 mai 1940, la critique de cinéma Lucie Derain estime que « l’exploitation cinématographique a un rôle important à jouer pour l’équilibre moral du pays. Tous les spectateurs ont des êtres chers qui sont au feu ou pour le moins mobilisés. L’angoisse justifiée des Français pour ceux qu’ils aiment peut les empêcher de vouloir prendre aucune distraction de peur d’y trouver un éclat bruyant, un air de fête incompatibles avec leurs pensées graves ». Malgré la baisse des recettes des cinémas, leurs directeurs maintiennent les portes ouvertes.
Au Gaumont-Palace, c’est Le Président Haudecoeur (Jean Dréville) avec Harry Baur qui occupe l’affiche la semaine du 10 mai 1940 suivi de Sérénade (Jean Boyer) avec Bernard Lancret, Lilian Harvey et Louis Jouvet le 17 mai pour deux semaines puis, à partir du 31 mai et durant la semaine où les Allemands entrent à Paris, Les Quatre Plumes blanches (Terence Young et Zoltan Korda).
Les années de l’Occupation allemande.
Les autorités de Vichy réorganisent, à travers la création du Comité d’Organisation de l’Industrie Cinématographique (C.O.I.C.), le secteur. Plusieurs lois portant sur le statut des juifs leur interdit d’exercer certains métiers, dont celui de directeur de cinéma. Ils sont ainsi contraints de céder leurs salles, notamment à une société aux capitaux allemands, la S.O.G.E.C.. En outre, tous leurs biens sont visés par les spoliations. Quant à la revue corporative La Cinématographie française, elle cesse de paraître et se voit bientôt remplacée par la revue collaborationniste Le Film.
Progressivement, les salles obtiennent l’autorisation de rouvrir. C’est le cas du Gaumont-Palace qui effectue sa réouverture le 28 août 1940 avec le film d’Albert Valentin L’Héritier des Mondésir interprété par Fernandel, Elvire Popesco et Jules Berry.
Ci-dessus: réouverture au moment de l’Occupation, le 28 août 1940.
Durant les années noires de l’Occupation, le cinéma conserve sa vitalité : les salles, qui offrent un peu de répit à la situation politique, sont pleines ; d’autant que les spectateurs peuvent s’y réfugier dans les salles chauffées et même s’y abriter. Les films américains étant bannis par les autorités, les spectateurs ont le choix entre des productions françaises, allemandes ou italiennes.
Les cinémas Rex et Marignan Pathé sont réquisitionnés pour les troupes d’Occupation et affichent des longs métrages de langue allemande. Comme le précise Le Film, « les actualités officielles les plus récentes » sont projetées dans ces Soldatenkinos. Le cinéma Le Paris, installés sur les Champs-Élysées, est à son tour réquisitionné quelques mois plus tard, en avril 1941.
Le 12 octobre 1940, les autorités d’Occupation communiquent dans la presse : « Dernièrement, on a pu entendre dans diverses salles de cinémas parisiens des applaudissements au cours de la projection des Actualités. Ces manifestations doivent être considérées comme des provocations à l’égard des troupes d’occupation. Si de telles manifestations devaient se reproduire, ne fut-ce que dans un cas isolé, cela aurait pour conséquences la fermeture de tous les cinémas parisiens ».
Les Parisiens se rendent au Gaumont-Palace pour découvrir, entre autres, Pièges (Robert Siodmak) avec Maurice Chevalier la semaine du 18 septembre 1940 avec sur scène la vedette de la chanson Lucienne Delyle, L’Homme du Niger (Jacques de Baroncelli) avec Harry Baur et Victor Francen celle du 2 octobre, L’Homme qui cherche la vérité (Alexander Esway) avec Raimu le 20 novembre, le film allemand Pages Immortelles (Carl Froelich) avec Zarah Leander le 4 décembre ou bien Angelica (Jean Choux) avec Viviane Romance le 18 décembre qui va accueillir, la seule journée du dimanche 22 décembre, 10 567 spectateurs.
La Préfecture de Police demande aux cinémas de passer obligatoirement à chaque séance un disque pour informer le public des consignes à suivre en cas d’alerte. Approuvé par les services de la Préfecture, les exploitants doivent retirer, à partir du 22 décembre 1940, un exemplaire du disque contre la somme de 20 francs.
Ci-dessus: salle durant la matinée du cinéma, le 29 décembre 1940, offerte par l’A.C.E. aux enfants de prisonniers et de chômeurs.
Le lundi 30 décembre 1940 à 10 heures, la société de distribution Alliance Cinématographique Européenne (A.C.E.) et la direction des Établissements Gaumont organisent une séance offerte aux enfants de prisonniers, disparus et chômeurs. Au programme, les Actualités A.C.E., un dessin animé, deux attractions et un grand film A.C.E.. Pour y assister, les enfants et les mamans doivent présenter une carte postale d’un prisonnier, d’une feuille d’allocations militaires ou d’une carte de chômage.
Ci-dessus: Une mère (Gustav Ucicky) le 12 mars 1941.
L’année 1941 débute au Gaumont-Palace avec le film Café du Port (Jean Choux) interprété par René Dary à l’affiche le 1er janvier. Suivent Sur le plancher des vaches (Pierre-Jean Ducis) avec Noël-Noël le 17 janvier puis un certain nombre de productions allemandes distribuées par l’A.C.E. comme Le Paradis des célibataires (Kurt Hoffmann) avec Heinz Ruhmann le 29 janvier 1941, L’Océan en feu (Günther Rittau) le 12 février, Le Maître de poste de Gustav Ucicky avec Heinrich George dans le rôle-titre le 26 février, La Folle étudiante (Erich Engel) avec Jenny Jugo le 5 mars 1941 ou Une mère (Gustav Ucicky) avec Käthe Dorsch en mère dévouée le 12 mars.
Ci-dessus: Sur le plancher des vaches (Pierre-Jean Ducis) la semaine du 15 janvier 1941.
Ci-dessus: Paradis perdu (Abel Gance) la semaine du 26 mars 1941.
Des productions allemandes et françaises suivent comme Nanette (Erich Engel) avec Jenny Jugo le 2 avril 1941 avec sur scène « la grande vedette de la chanson » Édith Piaf, Cora Terry (Georg Jacoby) avec Marika Rokk le 9 mai avec sur scène Johnny Hess, Sans lendemain (Max Ophüls) qui enregistre la semaine du 30 avril 44 055 admirateurs d’Edwige Feuillère, Première (Géza von Bolváry) avec Zarah Leander le 14 mai avec sur scène Fréhel ou bien le film de propagande antisémite Le Juif Süss réalisé par Veit Harlan le 30 mai.
Ci-dessus: Nanette (Erich Engel) le 2 avril 1941 avec Édith Piaf sur scène.
Ci-dessus: Sans lendemain (Max Ophüls) le 30 avril 1941.
Ci-dessus: Cora Terry (Georg Jacoby) la semaine du 7 mai 1941.
Ci-dessus: Première (Géza von Bolváry) avec Fréhel sur scène la semaine du 14 mai 1941.
Ci-dessus: Orage (Marc Allégret) la semaine du 18 juin 1941.
La nouvelle revue collaborationniste Le Film annonce dans son édition du 24 mai 1941 qu’un portrait du Maréchal Pétain est en vente (format 80 X 110 cm) au prix de 25 francs et précise dans un encart que « ce portrait que nous recommandons aux exploitants de placer dans le hall d’entrée de leurs salles, ne peut être expédié, vu ses grandes dimensions. Il doit être pris au siège du groupement ».
Le quotidien collaborationniste La France au travail dans son numéro du 17 juin 1941 accuse Gaumont, dont le siège est situé 3 rue Caulaincourt, derrière le Gaumont-Palace à côté du cimetière, de méthodes brutales envers le personnel féminin qui subirait des brimades allant jusqu’au renvoi. Au passage est souligné que le grand cinéma « a coûté jusqu’ici des millions à la collectivité ». Le directeur du cinéma est enfin accusé de marché noir « sous la couverture d’une coopérative fantôme financée au départ par le personnel des salles du circuit qui n’a jamais touché le moindre approvisionnement ». Le quotidien collaborationniste précise : « Nous tenons le nom des personnes et tous détails à disposition »
La semaine du 26 juin de la même année, les Actualités Mondiales – nouveau nom des actualités de l’A.C.E. projetées dans toutes les salles de la zone occupée et outil de propagande majeur – montrent le Maréchal Pétain prononcer son discours du 17 juin 1941.
Ci-dessus: La Fille du puisatier (Marcel Pagnol) du 17 au 30 septembre 1941.
Ci-dessus: programme pour la semaine du 24 septembre 1941.
Le Gaumont-Palace poursuit sa programmation avec, la semaine du 11 juin, Le Roman de Renard (Ladislas et Irène Starewitch), film de marionnettes réalisé en double version allemand-français et sorti à Berlin quatre années plus tôt. Suivent La Joie d’être père (Kurt Hoffmann) avec Heinz Rühmann le 6 août, Battement de cœur (Henri Decoin) – un des grands succès de l’Occupation – avec Danielle Darrieux le 3 septembre, La Fille du puisatier (Marcel Pagnol) le 17 septembre pour deux semaines, Volpone (Maurice Tourneur) avec Harry Baur et Louis Jouvet le 29 octobre ou bien Madame Sans-Gêne (Roger Richebé) avec la pétulante Arletty le 24 décembre.
Ci-dessus: Les Musiciens du ciel (Georges Lacombe) la semaine du 10 septembre 1941.
Ci-dessus: À vos ordres, Madame (Jean Boyer) la semaine du 18 novembre 1942.
Ci-dessus: Madame Sans-Gêne (Roger Richebé) le 24 décembre 1941.
En janvier 1942, le Préfet de Police de Paris prescrit l’interdiction absolue de l’usage des strapontins dans les salles de cinéma. Cette mesure, qui n’est en fait qu’un rappel adressé aux exploitants d’une mesure prise aux premiers jours de la guerre, a pour but de faciliter l’évacuation des spectateurs en cas d’alerte.
Montmartre-sur-Seine (Georges Lacombe) avec Édith Piaf est donné la semaine du 21 janvier 1942, Les Jours heureux (Jean de Marguenat) avec Pierre-Richard Willm le 25 février ou bien Histoire de rire (Marcel L’Herbier) avec Fernand Gravey, Marie Déa et Micheline Presle le 25 mars.
Ci-dessus: Ce n’est pas moi (Jacques de Baroncelli) le 4 février 1942.
Ci-dessus: panneau obligatoire à la caisse des cinémas en mars 1942.
Ci-dessus: panneau obligatoire aux caisses des cinéma en mai 1942.
Le 28 mars, les œuvres sociales du C.O.I.C. organisent au Gaumont-Palace leur premier gala officiel qui accueille le tour de chant sur scène des deux grandes vedettes de l’époque, Tino Rossi et Fernandel. Ce sera ensuite au tour de Raimu, accompagné de ses partenaires du Théâtre des Variétés, d’y rejouer la fameuse partie de cartes de Marius de Marcel Pagnol. La scène du cinéma accueille également les chanteurs Alibert, Georges Milton et Henry Garat.
Ci-dessus: La Loi du printemps (Jacques Daniel-Norman) le 22 juillet 1942.
Fièvres (Jean Delannoy), dans lequel Tino Rossi chante l’Ave Maria de Schubert, est donné la semaine du 8 avril 1942, Brazza ou l’Épopée du Congo (Léon Poirier) celle du 20 mai avec en complément sur scène le tour de chant de Charles Trenet, La Duchesse de Langeais (Jacques de Baroncelli) interprété par Edwige Feuillère sur un scénario de Jean Giraudoux le 17 juin ou bien La Loi du printemps (Jacques Daniel-Norman) avec Alice Field et Pierre Renoir le 22 juillet qui attire 40 067 spectateurs après une brillante exclusivité au Paramount.
Le 21 août, France-Actualités sont lancées. Journal unique pour toutes les salles de cinéma, elles remplacent les Actualités mondiales de l’A.C.E. et continuent de véhiculer la propagande collaborationniste, comme l’indique Le Film : « Tous les français vont pouvoir assister chaque semaine aux mêmes reportages (…) On sait ce que cela représente au point de vue du maintien de l’unité du pays »
Ci-dessus: Dernier atout (Jacques Becker), « film visible par tous », le 30 septembre 1942.
Ci-dessus: La Neige sur les pas (André Berthomieu) le 19 août 1942.
Les grands succès de l’Occupation.
Les films à succès se succèdent sur l’écran du Gaumont-Palace : La Comédie du bonheur (Marcel L’Herbier), coproduction Discina et de la Scalera italienne, est projeté la semaine du 16 septembre, Dernier atout (Jacques Becker) avec Pierre Renoir celle du 30 septembre, Le Lit à colonnes (Roland Tual) adapté de Louise de Vilmorin avec le jeune Jean Marais le 16 octobre ou bien La Nuit fantastique (Marcel L’Herbier) avec Micheline Presle et Fernand Gravey le 6 novembre.
Les samedi 14 et lundi 16 novembre 1942, la remise des primes de la Loterie Nationale a lieu sur la scène du Gaumont-Palace. Ces primes, réservées aux billets et dixièmes de billets de la 20ème tranche, sont cumulables avec les lots habituels gagnés au tirage au sort : le premier lot reçoit 50 000 frs et les détenteurs de billets se terminant par 30 093 gagnent 500 frs.
Ci-dessus: publicité parue dans Le Film pour Feu sacré (Maurice Cloche) la semaine du 30 décembre 1942.
Ci-dessus: Noël 1942 organisé par le journal Le Matin.
En application de la Loi des Finances du 31 décembre 1942, le Gouvernement décide de porter le taux de la taxe de transaction à 18% pour un certain nombre de commerces, dont les salles de spectacle. En conséquence, le prix des places de cinéma augmente de 20% à partir du 1er février 1943.
La presse annonce début janvier 1943 : « En application de la décision n°42 du Comité de Direction du C.O.I.C., tous les cinémas du Territoire Français seront fermés jusqu’à nouvel ordre un jour par semaine, le mardi. Cette décision étant applicable à partir du 10 janvier 1943, toutes les salles fermeront mardi prochain 12 janvier 1943 ».
Ci-dessus: les artistes durant La Nuit du cinéma du 27 février 1943.
Le samedi 27 février 1943 se déroule La Nuit du cinéma : pendant 5 heures, de nombreuses vedettes se produisent sur scène, parmi lesquelles Sacha Guitry, Mona Goya en danseuse créole, Jeanne Fusier-Gir en danseuse fantaisiste de French cancan, Noël-Noël, le tour de chant de Tino Rossi, Aimos, Micheline Presle qui chante Le Paradis perdu, François Périer, Jean Tissier… Deux défections sont à déplorer : Raimu et Charles Trenet, présents dans la salle mais pas sur scène.
Ci-dessus: Pontcarral, colonel d’Empire (Jean Delannoy) la semaine du 14 avril 1943.
Parmi les films présentés au Gaumont-Palace en 1943, citons Le Destin fabuleux de Désirée Clary (Sacha Guitry) avec Gaby Morlay dans le rôle-titre la semaine du 27 janvier, les deux parties du Comte de Monte-Cristo (Robert Vernay et Ferruccio Cerio) avec Pierre-Richard Willm les semaines du 31 mars et 7 avril, Pontcarral, colonel d’Empire (Jean Delannoy) avec Pierre Blanchar le 14 avril, Les Visiteurs du soir (Marcel Carné) le 21 avril ou bien L’Honorable Catherine (Marcel L’Herbier) le 5 mai.
À partir du 30 avril, la journée de fermeture hebdomadaire du Gaumont-Palace est le vendredi. Le 30 mai, Le gala des vedettes est organisée sous le patronage du quotidien collaborationniste La France socialiste au profit du secours national. Les spectateurs sont munis d’autorisations spéciales de circuler pour rejoindre leur domicile à 2 heures du matin, heure à laquelle se termine le spectacle. Parmi les vedettes qui se produisent ce soir-là : Suzy Solidor, Albert Préjean, André Dassary, Édith Piaf, Johnny Hess et Jean Tissier. Des couples de vedettes valsent ensemble sur scène, parmi lesquelles Gaby Morlay et André Brûle, Duvalles et Denise Grey, Georges Marchal et Simone Valère, Raymond Souplex et Jeanne Sourza.
Le 17 juillet 1943, le comité d’action antibolchévique organise une réunion de propagande avec pour thème « Le peuple russe contre le Bolchévisme » et qui voit le drapeau à croix gammée fixé sur le rideau de scène.
Lors du 10ème gala offert aux familles des travailleurs Français en Allemagne, avec l’appui des autorités Allemandes, le danseur et chorégraphe Serge Lifar se produit le 1er octobre 1943 sur la scène du Gaumont-Palace avec les ballets de l’Opéra de Paris. Outre ce célèbre danseur, le programme annonce les Actualités de la semaine, un documentaire, le grand Orchestre de Radio-Paris et la chorale Émile Passani. Au cours de gala, le grand Orchestre de Radio-Paris, qui comprend plus de cent musiciens, exécute L’Hymne des travailleurs français avec le concours de la chorale Passani.
On peut voir au Gaumont-Palace à partir du 29 septembre 1943 Le Capitaine Fracasse (Abel Gance), adaptation du roman de Théophile Gautier avec Fernand Gravey dans le rôle du Baron de Sigognac, L’Escalier sans fin (Georges Lacombe) avec Pierre Fresnay et Madeleine Renaud qui enregistre 54 997 spectateurs la semaine du 27 octobre, Domino (Roger Richebé) avec Fernand Gravey la semaine du 24 novembre et L’Inévitable Monsieur Dubois (Pierre Billon) que découvrent 62 986 spectateurs la semaine du 29 décembre.
Ci-dessus: publicité dans Le Film pour L’Escalier sans fin (Georges Lacombe) la semaine du 17 octobre 1943.
Ci-dessus: la propagande au Gaumont-Palace le 7 novembre 1943.
Ci-dessus: L’Inévitable Monsieur Dubois (Pierre Billon) la semaine du 29 décembre 1943.
Cette période de l’Occupation contraint les exploitants à certaines obligations, notamment un ordre obligatoire de projection : en début de séance, le documentaire est diffusé suivi des Actualités puis du grand film. « Les actualités doivent toujours être présentées avant le grand film » précise la Filmprüfstelle, responsable de la censure, qui organise des contrôles pour la bonne application. Durant ces années d’Occupation, les cinémas ne projettent pas de publicités.
Ce début d’année 1944 voit la projection de Vénus aveugle (Abel Gance) avec Viviane Romance à l’affiche la semaine du 5 janvier 1944. Le grand succès de l’Occupation, L’Éternel retour (Jean Delannoy, sur un scénario de Jean Cocteau) arrive au Gaumont-Palace le 2 avril : 52 336 afficionados de Jean Marais et Madeleine Sologne se ruent cette semaine-là; comparé à Vautrin (Pierre Billon) avec Michel Simon qui enregistre 56 199 entrées en 15 jours à partir du 29 mars.
Ci-dessus: La 3ème Nuit du cinéma le 31 mars 1944.
Le 31 mars, de 23 heures à 6 heures du matin, le Gaumont-Palace accueille la troisième Nuit du cinéma au profit du Secours national. Toutes les grandes vedettes sont annoncées au gala pour lequel les spectateurs doivent débourser de 200 à 1 500 francs suivant l’emplacement du fauteuil. Cet événement accueille sur scène Fernandel, Pierre-Richard Willm, Raymond Rouleau, Bernard Blier, Georges Guétary, Andrex, Saturnin Fabre, Junie Astor, Jean Dessailly et tant d’autres. La partie cinéma est composée des premiers films Lumière, d’un film de Georges Méliès et d’un de Max Linder, accompagnés de l’inévitable propagande de France-Actualités.
L’Œuvre, quotidien collaborationniste, annonce dans son édition du 21 avril 1944 : « Le 36ème gala organisé par l’Association nationale des amis des travailleurs français en Allemagne (Fédération nationale des Comités d’entraide) avec l’appui du commissariat national d’action sociale pour les Français travaillant en Allemagne et les autorités allemandes a lieu au Gaumont-Palace, le vendredi 21 avril 1944 à 18h30». La veille a eu lieu « une imposante manifestation nationale socialiste à l’occasion du 55ème anniversaire d’Aldolf Hitler.» Le journal précise que « plusieurs milliers de soldats allemands, groupés autour de leur chef et les principaux membres des organismes allemands de la capitale étaient présents. Ils acclamèrent longuement le nom du Führer et affirmèrent à nouveau leur fidélité à Adolf Hitler, Führer du grand Reich Allemand et chef de la coalition européenne contre le bolchévisme et ses alliés anglo-américains ».
Ci-dessus: affiche pour la publicité du Gaumont-Palace dans la rue et le métro. L’espace blanc du milieu permet d’afficher chaque semaine le programme.
Ci-dessus: Graine au vent (Maurice Gleize) le 19 juillet 1944.
L’adaptation de Balzac Le Colonel Chabert (René Le Hénaff) avec Raimu dans le rôle-titre est projetée au Gaumont-Palace la semaine du 3 mai, suivi le 10 mai de l’adaptation du roman de Georges Simenon Cécile est morte, une production Continental Films réalisée par Maurice Tourneur avec Albert Préjean dans le rôle de l’inspecteur Maigret. On y joue également Le Voyageur sans bagage de Jean Anouilh d’après sa pièce à l’affiche dès le 7 juin pour deux semaines ou encore Graine au vent (Maurice Gleize) projeté de manière discontinue dès le 19 juillet.
Le dernier film du Gaumont-Palace durant la période de l’Occupation est la reprise de Cartacalha, reine des gitans (Léon Mathot) la semaine du 9 août. Un arrêté du 22 juillet 1944 du Ministère de la Production Industrielle fixe la fermeture des cinémas de Paris et des départements de la Seine, la Seine-et-Oise et Seine-et-Marne du 23 au 30 juillet. Celui-ci est prolongé.
Le 19 août 1944, Paris se libère.
Episode précédent: le Gaumont-Palace : splendeur et désillusions (1931-1939)
Episode suivant: Le Gaumont-Palace: restrictions et opulence (1945-1950).
Textes: Thierry Béné.
Documents: Bibliothèque Historique de la Ville de Paris, Gallica-BnF, Le Film, Le Matin, Gaumont, Comoedia.
Thank you Paul for this touching remark on this work on the Gaumont-Palace. The rest is coming…
Thank you for this edifying and well-researched series of essays related to the famed « Gaumont Palace ». I am sure my great-grandfather Leon Gaumont would be most appreciative.