Adresse: 90 boulevard de Clichy à Paris (18ème arrondissement)
Nombre de salles: 1 puis 4
A l’emplacement du Jardin d’hiver du Moulin Rouge, transformé au début des années 1960 par l’acteur André Pousse en boîte de nuit La Locomotive, un nouveau cinéma voit le jour le 29 octobre 1968: le Paramount Montmartre.
L’architecte Georges Peynet imagine un cinéma dont le hall et la façade sont communs avec le cinéma Moulin Rouge, un ancien music-hall transformé en salle de cinéma et qui jouxte l’ancienne boîte de nuit.
La revue professionnelle Le Film français commente alors cette nouvelle ouverture d’un cinéma dans la capitale: « accès spacieux débouchant sur un foyer aménagé sous les derniers gradins de la salle (650 places) traitée en amphithéâtre. La décoration est originale et particulièrement élégante: le plafond de la salle d’une conception fonctionnelle, est composée de pénétrateurs de plans. Ceux-ci dégageant la projection, portent les ondes sonores jusqu’aux derniers rangs des spectateurs. Aux deux tiers de la salle, un plancher gradué vient s’amortir sur un vaste podium: un écran de 12×6 mètres occupe toute la largeur du fond de la salle… Fauteuils et moquette au sol s’harmonisent dans des tons « pains grillés »… La cabine a été conçue pour recevoir quatre appareils de projection. Sa disposition par rapport à l’écran donne une projection techniquement parfaite ».
Ci-dessus: la salle du cinéma Paramount Montmartre à son ouverture en 1968.
Ci-dessus: le hall du cinéma Paramount Montmartre à son ouverture en 1968.
La fin des années 1960 rime avec l’expansion du circuit cinématographique Parafrance, dont la direction est assurée par Jo et Sammy Siritzky. Les deux frères ouvrent plusieurs salles modernes et confortables comme le Paramount Elysées à Paris (600 fauteuils) ou, à Nice, le cinéma Paramount de la rue de la Liberté (deux salles de 700 et 300 fauteuils). On retrouve dans les salles du circuit les fauteuils spécialement créés pour celle des Champs-Elysées, la salle phare du circuit. Les confortables fauteuils seront généralisés dans toutes les salles Parafrance.
Pour le début de son exploitation, le Paramount Montmartre est inclus dans la combinaison de films programmés au Balzac, au Festival, au Max Linder, au Miramar et au Mistral. Le film de Jean Girault « Le Gendarme se marie » avec Louis de Funès inaugure cette nouvelle combinaison. Des œuvres à fort potentiel commercial suivent dans ces salles comme « La Piscine » de Jacques Deray à l’affiche le 31 janvier 1969, « Bullitt » de Peter Yates avec Steve Mac Queen le 28 mars de la même année, « L’Ours et la poupée » de Michel Deville le 4 février 1970 ou « Borsalino » de Jacques Deray le 20 mars 1970.
La salle du Paramount Montmartre est équipée au format 70MM et propose le 28 août 1970 le film « Gonflés à bloc » de Ken Annakin et Sam Itzkovitch avec Bourvil et Mireille Darc puis le 16 septembre « La Kermesse de l’Ouest » de Joshua Logan avec Lee Marvin et Clint Eastwood, un film dont la Paramount avait coupé toutes las parties musicales pour sa sortie en France, ne gardant que deux chansons en vendant le film comme un western. Pour ce dernier film, le Paramount Montmartre est intégré avec les sorties du prestigieux Paramount Opéra des grands boulevards.
Ci-dessus: « Le Gendarme se marie » inaugure la salle du Paramount Montmartre en 1968. Le Moulin Rouge Cinéma jouxte le Paramount.
Ci-dessus: « L’Homme qui tua Liberty Valance » de John Ford à l’affiche en réédition le 5 août 1970.
Ci-dessus: « La Piscine » de Jacques Deray avec Alain Delon et Romy Schneider à l’affiche le 31 janvier 1969.
En ce début des années 1970, le quartier de la place Blanche et de Pigalle connaît un déclin massif de la fréquentation de ses cinémas, entraînant la fermeture définitive du Gaumont-Palace proche de la place Clichy. Une concentration de la fréquentation des salles de cinéma s’effectue dans des quartiers dotés de nouveaux complexes multisalles comme les grands boulevards, les Champs-Elysées ou le quartier du Montparnasse.
Dans le Film français du 30 novembre 1979, Jo Siritzky évoque le déclin des salles mono-écran dont il juge l’avenir incertain face aux complexes dotés de plusieurs salles. Son circuit, qui possède alors les cinémas mono-écran Moulin Rouge Cinéma et Max-Linder, entame la transformation de ses cinémas afin d’ouvrir des complexes multisalles davantage rentables. La restructuration du cinéma Max-Linder en un complexe multisalles est annoncée mais n’aura jamais lieu. Quant à la salle du Moulin Rouge Cinéma, elle ferme définitivement ses portes le 23 décembre 1980.
La salle de 650 fauteuils du Paramount Montmartre suit ainsi la tendance de restructuration des salles uniques en complexes multisalles. Durant l’hiver 1978-1979, la salle est divisée en quatre salles d’une capacité de 250, 140, 130 et 100 fauteuils.
Malgré une affiche variée et dynamique avec des films à succès comme « La Dérobade » de Daniel Duval ou « Coup de torchon » de Bertrand Tavernier, le nouveau Paramount Montmartre reste au-deçà des visées d’augmentation de sa fréquentation. Les programmateurs se tournent alors vers un genre moins noble, le « cinéma bis » , mais cela ne suffit pas à rentabiliser le complexe cinématographique qui enregistre une baisse de sa fréquentation; certaines semaines n’attirent que 2 000 spectateurs dans ses quatre salles.
Les difficultés financières de Parafrance au mitan des années 1980 entraînent la fermeture définitive du Paramount Montmartre le 28 février 1985. Cette année noire pour l’exploitation parisienne voit également disparaître le Paramount Bastille, les Ursulines (qui rouvriront à nouveau), le Movies Halles, le Cluny Ecoles, le Midi-Minuit, le Studio Alpha et le Saint-Séverin. Avec ces nombreuses fermetures de salles de cinéma, la capitale perd quatorze écran en une année.
L’existence du Paramount Montmartre aura été brève avec dix années en salle unique et seulement six ans en complexe multisalles. Les espaces sont aujourd’hui occupés par la boîte de nuit La Machine du Moulin Rouge.
Ci-dessus: « Bullitt » à l’affiche le 28 mars 1969.
Remerciements: M. Thierry Béné.
Photos et documents: Le Film français.
Merci Philippe Célérier pour ces encouragements et précieux commentaires!
Quelle hécatombe, effectivement, ces salles perdues à jamais!
A bientôt.
Bonjour,
Très bel article comme toujours, bravo !
Pour ma part, je recense 35 écrans parisiens en moins pour cette terrible année 1985…J’ajoute donc : UGC Opéra (7 salles), 7ème Art Beaubourg (1 salle), Paris (1 salle), Monte-Carlo (1 salle), Delta (1 salle), Athéna (2 salles), André-Bazin (1 salle), Paramount-Gobelins (1 salle), Passy (1 salle), Paris-Loisirs-Bowling (2 salles), Clichy-Palace (1 salle), Barbès (1 salle) et Rivoli-Beaubourg (1 salle) !
Le pire sera à venir : 46 écrans en moins en 1986…40 en 1987…encore 32 en 1988, 26 en 1989… Mortelles années 80 !