Adresse: 140 boulevard de Clichy et 8 avenue de Clichy à Paris (XVIIIè arrondissement)
Nombre de salles: 12 (7 salles et 5 salles)
Création: 1956
Carte d’abonnement cinéma CinéPass Pathé-Gaumont acceptée.

Le 21 septembre 1956 est inauguré place Clichy un cinéma monumental à l’immense façade, le Wepler. Initié par Pathé qui acquiert quelques mois plus tôt une partie du terrain composant le fameux restaurant d’huîtres Wepler, le nouveau cinéma concurrence le Gaumont Palace voisin, la plus grande salle d’Europe déjà sur le déclin.

L’hebdomadaire Le Film français dans son numéro 651 évoque l’ouverture de cette nouvelle salle parisienne: « construit sur l’emplacement d’une partie de la célèbre brasserie Wepler, qui existait déjà du temps où les moulins de Montmartre dominaient encore la « barrière » de Clichy, ce cinéma possède des caractéristiques totalement nouvelles. Il était tout d’abord nécessaire que le nouveau cinéma différât des salles avoisinantes par sa façade: celle-ci a été conçue comme une vitrine monumentale transparente et toute en lumière. Elle est l’enseigne brillante et vivante de la salle et des spectacles qui s’y déroulent. Entièrement recouverte de glace « Sécurit », cette large ouverture permet d’apercevoir de l’extérieur les foyers et les escaliers baignés de lumière. La salle est implantée en contrebas dans l’axe de l’entrée (…) quatre étages supplémentaires, aménagés en bureaux, s’élèvent en façade au dessus de la vitrine: ces locaux sont desservis par un escalier et des ascenseurs avec entrée en angle. (…) La cabine de projection est accrochée à l’ossature des mezzanines; cet emplacement a été déterminé en vue d’une projection rigoureusement horizontale sur l’écran, et pour permettre l’utilisation de tous les systèmes actuels, de l’image normale à l’image cinémascopique. »

La revue poursuit: « La salle comporte trois catégories de places disposées sur trois niveaux différents. A l’orchestre, en contrebas de 3 mètres du niveau extérieur: 925 fauteuils; à la mezzanine, légèrement en surélévation par rapport au niveau extérieur: 343 fauteuils; au balcon, 412 fauteuils, soit une capacité totale d’environ 1700 places. Les fauteuils, d’un type nouveau, sont à armature en tube d’acier reposant sur un socle en tôle emboutie. Ils sont de couleur jaune à bordure noire avec accoudoirs blancs. Pour l’éclairage intérieur on utilise des faisceaux de lumière noire réagissant sur les peintures fluorescentes des murs latéraux. Le spectateur perdant la sensation du plan du mur a le sentiment d’être entouré de nappes lumineuses colorées, suffisantes pour l’éclairement de la salle pendant l’entracte. Le plafond et les murs sont recouverts de staff perforé. Insonorisés et isolés du remplissage de parpaings par un matelas de laine de verre. Une grande estrade permet la présentation d’attractions et de spectacles de variétés. A cet effet, des loges sont installées derrière l’écran. Une fosse d’orchestre a été conçue pour être escamotable. La salle a été voulue intime malgré ses grandes dimensions et ce résultat fut obtenu grâce à des formes très enveloppantes, soutenues par une gamme de teintes, gris perle, prune et jaune clair, ainsi que par l’emploi absolument nouveau de la lumière noire sur les parois latérales ».

Ci-dessus: la façade du cinéma Pathé Wepler en 1956, année de son ouverture, avec à l’affiche « Paris Palace Hôtel ».

Ci-dessus: la salle de 1700 fauteuils du cinéma Pathé Wepler en 1956. 

Ci-dessus: vues de la salle en 1956 avec son orchestre et ses deux balcons. 

Ci-dessus: vue en 1956 de la place Clichy depuis le premier étage du Wepler. 

Ci-dessus: la cabine de projection du Wepler. 

Ci-dessus: le hall du cinéma Pathé Wepler en 1956. 

Le succès du Pathé Wepler, le déclin du Gaumont Palace.

Pour son programme d’ouverture annoncé le 21 septembre 1956, c’est Trapèze de Carol Reed – un film tourné à Paris avec pour interprètes principaux Burt Lancaster, Tony Curtis et Gina Lollobrigida – qui a les faveurs de la nouvelle salle de la place Clichy. Pour la sortie de ses films, le Wepler s’associe avec les cinémas le Paris sur les Champs-Elysées et le Berlitz. Cette dernière salle, située sur les grands boulevards, met alors fin à son précédent partenariat de distribution avec le Gaumont Palace pour rejoindre le Wepler.

Le Wepler poursuit sa programmation avec de grandes productions à l’affiche de sa salle de 1700 fauteuils. Le 19 octobre, Paris Palace Hôtel d’Henri Verneuil est annoncé. Suivent le 26 novembre La Mariée est trop belle de Pierre Gaspard-Huit avec pour interprète celle qui deviendra l’icône de la sensualité Brigitte Bardot, puis le grand succès de cette fin d’année Michel Strogoff de Carmine Gallone le 14 décembre.

La combinaison de distribution des cinémas Le Paris / Berlitz / Wepler s’assure la diffusion des plus grandes exclusivités de l’époque, en particulier les productions avec Jean Gabin en vedette: Les Misérables de Jean-Paul Le Chanois le 12 mars 1958, Maigret tend un piège de Jean Delannoy le 29 septembre 1958, Le Désordre et la nuit de Gilles Grangier le 14 mai 1958, Les Grandes familles de Denys de la Patellière le 19 novembre 1958, Maigret et l’affaire Saint-Fiacre de Jean Delannoy le 2 septembre 1959, Rue des prairies de Denys de la Patellière le 21 octobre 1959, Le Baron de l’écluse de Jean Delannoy le 13 avril 1960, Le Président d’Henri Verneuil le 1 mars 1961, Le Cave se rebiffe de Gilles Grangier le 27 septembre 1961 (projeté également pour l’inauguration du nouveau cinéma de Montparnasse Le Bretagne), Mélodie en sous-sol d’Henri Verneuil le 3 avril 1963, Monsieur de Jean-Paul Le Chanois le 22 avril 1964 et enfin L’Âge ingrat de Gilles Grangier le 23 décembre 1964.

De grandes productions venues d’outre-Atlantique ont les faveurs du Wepler à l’instar du film d’Anthony Mann Le Cid à l’affiche le 13 décembre 1961 ou celui de Lewis Milestone Les Révoltés du Bounty le 21 décembre 1962, tous deux projetés au format 70 mm.

Le premier opus de la future franchise 007 arrive au Wepler le 8 mars 1963: James Bond contre Dr. No de Terence Young est suivi par Goldfinger de Guy Hamilton le 19 février 1965 tandis que le cinquième de la série, On ne vit que deux fois de Lewis Gilbert, occupe l’écran du Wepler le 20 septembre 1967. Au mitan des années 1950, la popularité des films distribués au Wepler amène le Gaumont Palace à programmer en majorité des coproductions européennes ou des films américains et français moins porteurs, ce qui provoque le déclin progressif du plus grand cinéma de France. Cependant, des productions comme Salomon et la Reine de Saba de King Vidor (1959) ou Ben-Hur (1969) de William Wyler viennent limiter la baisse de la fréquentation du cinéma aux 5000 fauteuils.

Ci-dessus: Trapèze de Carol Reed avec Burt Lancaster, Tony Curtis et Gina Lollobrigida est le film inaugural du Wepler, également à l’affiche du Berlitz et du Paris

Ci-dessus: Le Roi et moi de Walter Lang avec Deborah Kerr et Yul Brynner à l’affiche du Wepler le 16 janvier 1957.

Ci-dessus: Typhon sur Nagasaki d’Yves Ciampi avec Danielle Darrieux et Jean Marais à l’affiche du Wepler le 6 février 1957.

Ci-dessus: Sissi d’Ernst Marischka avec Romy Schneider à l’affiche du Wepler le 1er mars 1957.

Ci-dessus: Maigret et l’Affaire Saint-Fiacre de Jean Delannoy avec Jean Gabin et Robert Hirsch à l’affiche du Wepler, du Berlitz et du Paris le 2 septembre 1959.

Ci-dessus: Les 7 péchés capitaux un film à sketches de Eduardo De Filippo, Jean Dréville, Yves Allégret, Carlo Rim, Roberto Rossellini, Claude Autant-Lara et Georges Lacombe à l’affiche des cinémas Wepler, Le Paris, Le Français et Miramar le 7 mars 1962.

Ci-dessus: la façade du cinéma Wepler en 1962 avec à l’affiche Boccace 70 également projeté dans les salles parisiennes de l’Ermitage et du Miramar du circuit de Joseph Rytmann. Collection particulière.

Ci-dessus: Goldfinger de Guy Hamilton avec Sean Connery à l’affiche du Wepler, du Berlitz, du Pathé Marignan et du Bonaparte le 19 février 1965. 

A la fin des années 1960, les salles de grandes capacités connaissent des difficultés à obtenir des rendements satisfaisants. Aussi la société Pathé entreprend-elle la transformation de ses cinémas mono-écran en sacrifiant la grande salle pour ouvrir deux salles dans deux établissements distincts. Après la restructuration des salles Pathé à Marseille, celles de Pathé à Bruxelles et Pathé Marignan sur les Champs-Elysées, le Wepler à son tour est divisé en deux salles.

La transformation de la grande salle du Wepler en deux salles.

A l’issue de la dernière séance du 25 avril 1969, le Wepler ferme ses portes pour transformer sa vaste salle de 1700 fauteuils en deux salles: le Caravelle, doté de 480 fauteuils, et le Wepler qui compte 1100 fauteuils. La restructuration du nouveau complexe est réalisée par l’architecte Vladimir Scob.

Le Film français du 5 septembre 1969 revient sur le cinéma nouvellement pensé de la place Clichy: « La scission des salle s’est faite en hauteur par le coulage d’une dalle de béton au niveau de l’ancienne corbeille du Wepler. La partie supérieure abrite le nouveau Wepler ramené à 1100 places mais qui restera la grande salle de la place de Clichy, de conception classique, avec un orchestre et une corbeille. Les sièges de la maison Quinette sont coque-de-roche, la décoration est composée de murs et plafonds havane et moquette anthracite. La cabine est située en fond de mur-orchestre. Au foyer de l’orchestre est disposé un « Candy-Bar » pour la vente des confiseries et boissons non alcoolisées à consommer sur place. La façade sur rue est rajeunit dans les tons orange et blanc, avec une profusion de néons qui fera de ce complexe un temple de lumière voué au 7ème Art. Pour le Caravelle, Pierre Vercel, Directeur Général de la Société Les théâtres cinématographiques Pathé, précise: j’ai voulu, qu’en opposition au Wepler qui demeurera une salle classique, que le Caravelle soit un théâtre de détente évoquant le farniente des vacances. Cette salle de prestige, d’une conception révolutionnaire par ses agencements et sa décoration groupera 400 fauteuils-clubs Quinette, spécialement dessinés et créés pour Pathé-Cinéma dans le style meuble de jardin et rappelant ces sièges-brouettes que l’on dispose sur les pelouses ou le sable. Ils sont laqués blanc avec une moelleuse garniture orange et disposés en un amphithéâtre descendant doucement vers l’écran-ce dernier allant de mur à mur est légèrement surélevé. On pourra également boire à l’entracte au bar du foyer qui a une décoration de pergola laquée blanc, comme les fauteuils et bancs de jardin l’entourant. Le tout est surmonté d’un vélum genre parasol-Côte d’Azur allant du vert véronèse au violet. Quant aux murs du théâtre, ils sont revêtus de panneaux en relief, de couleurs très vives et différentes allant du jaune-canari au ventre-de-biche en passant par l’orange, le turquoise et le violine ».

Ci-dessus: plan du cinéma en 1969 qui voit sa salle unique divisée en deux salles: la « salle haute » occupe les deux anciens balcons, la « salle basse »  l’ancien orchestre. Cette dernière est baptisée Caravelle.

Pathé Wepler

Ci-dessus: la salle Wepler en septembre 1969 édifiée des anciens orchestre et mezzanine du Wepler.

Pathé Wepler

Ci-dessus: la salle Caravelle en septembre 1969, la nouvelle salle du Wepler.

Pathé Wepler

Ci-dessus: le bar du Caravelle en 1969.

Le nouveau Wepler ouvre le 19 septembre 1969 et rejoint, pour renforcer sa fréquentation, la combinaison des cinémas Marignan / Richelieu / Montrouge-Palace avec le film La Bataille d’Angleterre. Le Caravelle est inauguré le mercredi 24 septembre avec le film de Georges Cukor Justine. La salle est incluse dans la combinaison des cinémas Colisée / Le Français / Gaumont Rive-Gauche.

1972 est l’année noire pour le grand voisin du Wepler: le mythique Gaumont-Palace ferme définitivement ses portes dans l’indifférence générale. Au Wepler, le succès est au rendez-vous lors de cette décennie avec, entre autres à l’affiche, Le Mur de l’Atlantique de Marcel Camus le 14 octobre 1970, Max et les ferrailleurs de Claude Sautet le 16 février 1971, Il était une fois la révolution de Sergio Leone le 29 mars 1972 ou bien la sortie limitée à trois salles de Tremblement de terre de Mark Robson qui inaugure l’éphémère technologie du Sensurround.

Afin d’augmenter la capacité de ses salles, le Wepler acquiert en mai 1989 les quatre salles du cinéma voisin Les Images. C’est bientôt le tour de l’ancien cinéma Sélect, situé au 8 avenue de Clichy et devenu Pathé Clichy, de rejoindre le Wepler qui devient l’un des premiers multisalles de la capitale.

Le Wepler, un des premiers cinémas multiplexes inaugurés dans la capitale.

Les années 1990 voient arriver un nouveau concept de cinémas: les multiplexes. Ces grands complexes cinématographiques proposent une vaste offre de films dans leurs différentes salles dotées d’un confort optimal et d’une qualité de projection à la pointe. En 1994, le Wepler est entièrement détruit pour ne laisser que la façade historique. Le réalisateur Jean-Jacques Beinex immortalise d’ailleurs la destruction du cinéma dans un émouvant court-métrage intitulé Place Clichy sans complexe.

Ci-dessus: le cinéma Pathé Wepler en 1995. Restructuré avec l’intégration du Pathé Clichy et des Images, le multiplexe atteint 12 salles. 

Le 23 novembre 1994, le multiplexe Pathé Wepler est inauguré et devient, avec ses douze salles, l’un des cinémas gros porteurs de la capitale. A la fin de l’année 2012, le cinéma inaugure dans sa grande salle un nouveau concept de cinéma: la projection en 3D HFR Atmos. Une qualité de son et d’images exceptionnelles qui donnent la sensation d’une immersion totale dans le film.

En 2019, le Wepler subit de nouvelles rénovations avec un hall repensé pour l’accueil des spectateurs, des ascenseurs pour les personnes à mobilité réduite, des fauteuils duo ainsi qu’un écran géant sur la façade – qui remplace les traditionnels panneaux – pour annoncer les films à l’affiche.

Capacité du cinéma Pathé Wepler:

  • 12 salles
  • 2042 fauteuils

Programme et tarifs du cinéma Pathé Wepler à Paris.

Cinéma Pathé Wepler à Paris: façade du cinéma en 1956.

Ci-dessus: la façade du cinéma Pathé Wepler en 1956 avec à l’affiche Michel Strogoff.

Ci-dessus: façade du Pathé Clichy en 1982 (côté avenue de Clichy).

Remerciements: M. Thierry Béné.
Documents: Le Film français, La Cinématographie française, Gallica-BnF et collection particulière.